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PRÉFACE.

VERS le milieu du siècle de Louis XIV,

dit Mallet du Pan (1), ceux qui connais

» saient le nom de Moscovites, ne s'en for

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maient d'autre idée que celle qu'on nous On ne donne aujourd'hui des Tartares.

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savait pas même alors qu'il existât des annales russes; elles étaient ensevelies dans le fond des cloîtres on n'avait sur cette histoire et les mœurs de cette nation que des relations étrangères depuis long-temps oubliées, et dont on reconnaît aujourd'hui la franchise originale. Les tzars voulaient tenir leur peuple et les étrangers dans l'ignorance des affaires de leur empire (2).

(1) Du Péril de la Balance politique de l'Europe. Londres, 1789.

(2) Le baron de Stralhemberg, officier suédois fait prisonnier à la bataille de Poltawa, qui a passé dix-sept ans en Sibérie et en Russie, dit dans ses Mémoires, aussi estimables

Les successeurs de Pierre-le-Grand ont changé de politique à cet égard. On a vu paraître sous leurs auspices des histoires et des statistiques où les héros moscovites sont quelquefois mis au-dessus de ceux de la Grèce et

par les recherches historiques et statistiques, que par l'impartialité qui les caractérise:

« Il est très-difficile d'écrire sur la Russie, parce que, de tout temps, les mémoires particuliers ont été cachés....; parce » que, par une politique bizarre, les anciens souverains de ce » pays défendaient à leurs sujets d'écrire la moindre chose » sur leur patrie.

» En 1689, un noble russe avait fait imprimer un journal » de la campagne de Crimée sous Galitzin : ce journal fut » brûlé publiquement, quoiqu'il ne contênt rien contre le » gouvernement, ni le prince. Cet usage existait encore » au temps de Pierre-le-Grand, au point qu'il ignorait lui» même ce qui se passait dans les pays éloignés de sa réși» dence. »

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Ainsi M. de Stralhemberg ne put faire parvenir jusqu'à ce prince une carte générale de la Russie et de la Tartarie. Le prince Gagarin, alors gouverneur de la Sibérie, s'y opposa, et s'empara de son dessin sous divers prétextes.

La véritable raison, dit M. de Stralhemberg, était que, » tenant la Sibérie à ferme et la faisant valoir d'une manière >> convenable à ses intérêts, il ne voulait pas que ma carte parvint aux yeux du tzar, d'autant plus que j'y avais marqué beaucoup de particularités intéressantes, comme les >> endroits des mines, » (Description historique de l'empire Russien, traduction abrégée; Amsterdam, 1767; t. I, p. 52.)

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de Rome; où la nation paraît éclairée de toutes les lumières de la civilisation, le territoire embelli des plus riches productions de la nature, et le gouvernement affermi sur les plus admirables institutions sociales (1). Élisabeth

(1) Il a paru à Londres, en 1810, un Voyage en Russie, par le D. Ed. Dan. Clarke. Cet ouvrage, qui a eu un succès prodigieux en Angleterre, contient des renseignemens de tout genre, et présente des tableaux variés sous les formes les plus piquantes. Il ne donne pas de la Russie et des Russes une idée si favorable que les écrivains de Catherine. On peut en juger par l'opinion qu'il professe à leur égard.

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« On peut demander d'où vient qu'on a jusqu'ici pu»blié si peu de chose sur le caractère réel de ce misérable peuple [very profligate people]. La raison en est qu'il n'y » a point de pays où l'on ait pris tant de précautions pour » l'empêcher. Il n'y a rien en quoi Catherine II ait mis tant » d'artifice qu'à cacher l'histoire véritable de son peuple, et » l'état misérable de son empire. Cela se voit fréquemment » dans sa correspondance avec Voltaire, dans ses instruc»tions à ses ministres, dans les mensonges publiés par les » écrivains à gages, et particulièrement dans cet ouvrage » (l'Antidote) que ses savans firent en commun, sous ses » yeux et d'après ses observations, pour répondre au Voyage » de l'abbé Chappe..... Malheureusement, tous ceux que » Catherine employa à voyager dans les provinces de son » vaste empire, ne s'occupèrent que d'histoire naturelle. Ils >> n'ont laissé que de brillans tableaux de statistique des plus » malheureuses provinces. La plupart ont manqué d'infor

dou

et Catherine II sur-tout voulaient sans cesse occuper la Renommée à publier les merveilles d'un empire barbare (1); et il n'est pas teux que l'influence exercée par des écrivains célèbres n'ait agi dangereusement sur la politique générale. On représentait la Russie tantôt comme une puissance destinée à relever le trône de Constantin, tantôt comme l'asile futur des arts et de la civilisation; et à la faveur de ces notions vagues et de ces préjugés dangereux, elle poursuivait sa marche, et n'avançait peut-être pas moins par l'aveugle complaisance des écrivains étrangers, que par la terreur de ses armes,

Mais, quoiqu'on ait tant écrit de nos jours sur la Russie, on peut assurer que son histoire est peu connue, et sa puissance mal appréciée

»mations classiques. Ainsi Pallas avait représenté la Tauride » comme un Paradis terrestre. L'impératrice l'y envoya rési» der, et nous le trouvâmes sous ce climat pestilentiel, comme » il le dit lui-même, déplorant le malheur d'avoir été la dupe » du sacrifice qu'il avait fait à l'orgueil de sa souveraine. » ( Clarke's Travels, in-4.o; London, 1810; pag. 434 et suiv.)

(1) Edimburgh Review, n.o 32, pag. 353.

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