certitude que l'enfant royal, confié aux mains de ce nouveau gardien, reçut des soins qui contrastaient singulièrement avec l'abandon où on l'avait laissé, qu'il s'attacha à Laurent, mais surtout que ce dernier se montra par sa conduite, un homme bon, charitable, affectionné à son protégé. Si des faits extraordinaires et nouveaux se passèrent au Temple, durant ce temps-là, à coup sûr Laurent les connut, et, autant qu'on peut présumer, celui qui l'y avait introduit, Barras, fut l'instigateur et l'acteur caché des faits en question. Il est impossible, répétons-le, de reprendre ici tous les arguments qui prouvent une intervention du général dans le sort de Louis XVII et qui accusent la complicité de multiples personnages, la plupart influents dans le monde de la Convention. D'autres, et en premier lieu M. Henri Provins1, l'ont fait avec une abondance de détails et une conscience historique qui nous en dispensent. Ce que l'on tentera ici, ce sera de mettre au jour un ensemble de documents et de faits nouveaux, dont les résultats se trouveront être en con Herri Provins. Le dernier roi légitime de France. Paris, 1889, 2 vol. in-8°. nexité complète avec ce que l'on sait des agissements de Laurent au Temple. Mme Atkyns et ses amis n'ont pu se passer de celui-ci. Nulle part, il est vrai, son nom n'apparaît dans leurs propos; on a donné ailleurs la raison de ce silence, mais la coïncidence surprenante des événements qui se déroulent à l'intérieur de la prison et des effets qui s'ensuivent à Londres, au sein du comité royaliste, prouve surabondamment les relations qui les unissent. Au travers des documents, on arrive à comprendre ce qu'entendait Cormier par ces « combinaisons nouvelles. » Mme Atkyns a pris soin de le dire elle-même dans une de ces notes qu'elle plaçait en marge de sa correspondance et qui fourniront bien souvent l'explication de sa conduite. Inquiet de l'avenir, Cormier craignait-il que le souvenir du dévouement de la noble lady ne disparût avec elle, si par un hasard malheureux l'entreprise échouait ou si lui-même y perdait la vie? On ne sait. Toujours est-il que le 1er août 1794, il faisait rédiger copie de deux déclarations, dont le texte, hélas, ne nous est pas parvenu, mais dans lesquelles Mme Atkyns racontait ce qu'elle avait accompli jusque-là, pour le salut des êtres qu'elle (( chérissait. » « Ces faits sont à ma connais<< sance de la plus exacte vérité, affirmait « Cormier à la fin de l'acte, et depuis que j'ai (( l'honneur de connaître Mme Atkyns, j'atteste << qu'elle a témoigné publiquement et en par<< ticulier, dans toutes ses conversations, la << même pureté de principes et que les faits << qu'elle y a détaillés sont de la plus scrupu (( leuse exactitude'. » L'acte était destiné à être déposé avec les documents qu'il confirmait chez un notaire ou un homme de confiance, à Londres. Entre temps, les démarches et les tentatives se poursuivaient avec activité pour assurer les rapports avec le continent et avec Paris. Plus le temps passait, plus les amis de Mme Atkyns se rendaient compte qu'il eût été insensé de vouloir procéder à un enlèvement direct et subit dans les circonstances actuelles. A vrai dire, l'accalmie qui avait suivi le 9 thermidor, permettant à Paris de respirer et de reprendre haleine, s'était fait sentir aussi au Temple. La preuve en était la nomination de Laurent. Mais tenter d'agir aussitôt eût été de la folie. Ce qu'il fallait, c'était « travailler », Papiers inédits de Mme Atkyns. non seulement le Temple, mais ceux qui y exerçaient un pouvoir quelconque, tout en évitant de mettre trop de gens dans le secret de l'entreprise. Là encore, malheureusement, le prudent silence des documents empêche de donner avec certitude aucun nom. Ceux qui pour l'or de Mme Atkyns consentirent à se compromettre, prirent trop de précautions pour que rien ne pût révéler leur intervention. En attendant, l'héroïque femme complétait ses mesures. Par ses soins, deux capitaines entièrement à ses ordres, croisaient continuellement au large des côtes de France. Un troisième bateau, acheté par elle, avait reçu l'ordre de longer sans cesse la rive entre Nantes et la Rochelle, prêt à recevoir l'enfant1, si l'enlèvement s'accomplissait. Les sommes qu'il avait fallu fournir pour l'entretien de ces trois bâtiments et de leur personnel étaient considérables et c'est à grand'peine que Mme Atkyns parvenait à réunir les fonds nécessaires. L'on se trouvait entièrement entre les mains des agents, dont le concours, indispensable désormais, devait disparaître, dès qu'on tarderait à leur acquitter les sommes convenues. Aussi la malheureuse femme voyait-elle redoubler ses angoisses devant la grandeur de l'effort à faire. Que répondre à ces appels de Cormier, toujours plus pressants, la suppliant de trouver coûte que coûte l'argent exigé? La personne à laquelle on s'adressait paraît à plusieurs reprises dans les lettres, sous le nom du <<< Diable noir. )) (( La lettre de votre diable Note de la main de Mme Atkyns au bas d'une lettre de Cormier du 3 juin 1795. Papiers inédits de Mme Atkyns. (( noir me console un peu, mandait certain « jour Cormier, mais il a tant de fois remis et << tant promis... Mon Dieu! protégez-nous, << faites que pour cette fois il n'ait pas pro<< misen vain... Mais, d'après cette lettre, vous (( devriez avoir deux réponses assez positives << aujourd'hui. Je vais être dans le Purgatoire « jusqu'à cinq heures Mon Dieu, combien « m'enverrez-vous ou plutôt que pourrez-vous « m'envoyer?... Notre courage seul ne suffit pas, il faut soutenir celui des autres et ils « sont bien découragés et pis que cela, «C c'est ce juif, ce cupide, cet usurier de capi« taine,... mais c'est lui qui aura notre vie (( (( dans les mains... mais c'est celui qu'il ne faut pas rebuter ou bien où et quand en trouverons-nous un autre? Je vous en con<< jure, au nom vous savez de qui, de faire. (( |