à la peau; le trajet est direct, rarement oblique. L'anatomie pathologique des causes de cette fistule est encore à faire, au moins en très grande partie. Toutes paraissent d'ailleurs se rapporter à un obstacle au cours des larmes. La rétention précède la dilatation, et celle-ci la fistule. Les causes des fistules lacrymales démontrées par l'anatomie pathologique sont : 1° le rétrécissement congénital du canal nasal; 2° son oblitération congénitale signalée par Dupuytren, qui guérit son malade en creusant aux larmes un canal nasal artificiel; 3° le rétrécissement et même l'oblitération du canal nasal par un polype des fosses nasales; 4o l'épaississement fongueux de la muqueuse du canal nasal par inflammation chronique. Comme cause prédisposante, je dois signaler la présence, chez certains sujets, d'un diaphragme perforé, intermédiaire au sac lacrymal et au canal nasal, et chez d'autres la présence d'une valvule à l'orifice inférieur du canal nasal. Le rétablissement des voies naturelles, ou bien la substitution d'une fistule bimuqueuse à une fistule muqueuse cutanée par la perforation de l'os unguis, voilà les moyens de guérison. Le traitement de la fistule lacrymale par le séton ou par le clou métallique a quelquefois pour conséquence un pertuis fistuleux capillaire par lequel s'échappent de temps en temps quelques gouttelettes de fluide lacrymal parfaitement limpide. Fistule de la glande lacrymale. Un fait observé par M. Jarjavay me paraît établir la possibilité d'une fistule lacrymale sur la paupière supérieure. A la suite d'une plaie par un coup de couteau-poignard reçu sur la région palpébrale droite, il s'est établi une tumeur palpébrale avec fistule, par laquelle sort un liquide transparent analogue aux larmes. La tumeur palpébrale, qui paraît être le réservoir du liquide, augmente de volume toutes les fois que la sécrétion lacrymale est provoquée. Le malade en expulse le liquide łacrymal, lequel jaillit par la com pression exercée avec le doigt. L'œil est habituellement sec; il est quelquefois le siége d'une sensation de brûlure. La conjonctive est un peu injectée; un stylet introduit dans l'orifice arrivait dans une cavité placée dans l'épaisseur de la paupière supérieure. M. Jarjavay se proposait d'établir une fistule interne pour faciliter le passage des larmes dans la cavité conjonctivale. Le malade n'a pas reparu à l'hôpital. 2 ESPÈCE. Fistule aérienne des sinus frontaux. Peut-on donner le nom de fistule à une solution de continuité avec perte de substance des sinus frontaux et communication entre ces sinus et la peau? Oui, certainement. Ces fistules, dont un exemple célèbre, rapporté dans la thèse de Deschamps fils (1), a permis de déterminer la part que prennent les sinus frontaux à l'olfaction, ont même paru nécessiter un traitement particulier. Ainsi Dupuytren a cerné entre deux petites incisions semi-elliptiques l'orifice cutané d'une fistule frontale, et réuni les deux lèvres de la plaie à l'aide de la suture entortillée. Le fait suivant, dont M. Jarjavay m'a rendu le témoin, restera dans la science comme un des exemples les plus curieux du développement, avec perforation spontanée, des sinus frontaux. Le nommé Royé (Aimé), âgé de vingt-cinq ans, manouvrier, a été élevé dans la misère. Il fit, à l'âge de dixsept ans, une chute à la suite de laquelle il perdit connaissance, et fut obligé de garder le lit pendant un mois. Il ne porte aucune trace de cicatrice sur le front. Il entre à l'hôpital des Cliniques pour une tumeur qui s'est développée depuis un an, et qui s'est étendue de l'apo physe orbitaire externe du côté droit jusqu'au sinciput. Cette tumeur très proéminente a en largeur 21 centimètres. Point de changement de couleur à la peau. La base de cette (1) Traité des maladies des fosses nasales, Paris, 1804, in-8°. tumeur est occupée par des dents osseuses que l'on sent sous la peau et qui sont déjetées en dehors. Dans le reste de sa périphérie la tumeur est molle, très sonore à la percussion et évideminent formée par des gaz. Quand le malade se mouche, elle n'augmente pas de volume d'une manière évidente; mais l'oreille constate un sifflement au niveau de la racine du nez. Comprime-t-on cette tumeur avec force, le malade accuse un chatouillement dans l'apophyse orbitaire externe, puis dans la profondeur de la face, le long du cou, enfin dans la poitrine. A ce moment, le malade suffoque, il faut cesser la compression. Si l'on a eu la précaution d'ouvrir la bouche, cette suffocation n'a pas lieu. Pendant la compression, l'oreille constate encore un sifflement à la racine du nez. Il était facile d'en conclure qu'il existait chez cet individu une communication des sinus frontaux avec la tumeur aérienne. Ponction avec un trois-quarts explorateur; issue de gaz qui s'échappent en sifflant. La peau s'applique sur les parties profondes ; les dents osseuses déjà signalées sont très visibles. Le lendemain et le surlendemain, le malade s'étant mouché plusieurs fois et fortement, la tumeur a reparu. Par trois fois la ponction a été faite; par trois fois, après des efforts faits pendant l'action de se moucher, la tumeur a reparu. M. Jarjavay imagina, pour empêcher la reproduction de la tumeur, d'établir une fistule aérienne, et pour cela il pratiqua une ouverture dans laquelle il introduisit une sorte de bouton de chemise d'argent, dont la tige était creuse, afin de donner aux gaz une issue au dehors. A la suite de cette petite opération, inflammation de la membrane qui tapissait la poche, suppuration abondante. Deux incisions sont pratiquées pour donner issue au pus (1). (1) Ce fut dans cet état qu'il fut transporté dans mon service à l'hôpital de la Charité, salle Saint-Ferdinand, no 14. Il n'était plus possible alors Recollement prompt des téguments aux parties sousjacentes; il ne reste au bout d'un mois qu'une fistule située au-dessus du sourcil; de cette fistule sort du pus. Après cette inflammation, il a été impossible de constater le passage des gaz dans les sinus pendant que le malade faisait des efforts pour se moucher. On a pu constater, après les ponctions et incisions prâtiquées pour favoriser l'écoulement du pus, que les lames osseuses tendaient à se rapprocher, et s'étaient en effet en partie rapprochées. L'adhésion des téguments est générale, excepté au niveau de la fistule, où les parois du sinus frontal sont restées écartées. 3o ESPÈCE. Fistules laryngiennes et trachéales. Les plaies volontaires faites par les suicides, les plaies produites par l'art, ont quelquefois pour conséquence des fistules laryngiennes ou trachéales. Ces fistules sont même quelquefois entretenues par l'art, à l'aide de canules, lorsqu'un obstacle permanent à l'entrée de l'air rend une voie artificielle indispensable. Un certain nombre de faits semblent indiquer qu'une fois que l'air a pris l'habitude de passer par une autre voie que le larynx, celui-ci se rétrécit et s'oblitère, comme d'ailleurs la plupart des conduits naturels rendus inutiles par une voie artificielle. J'ai décrit plus haut le larynx oblitéré d'un forçat, à la suite d'une tentative de suicide. M. Bul de constater le passage de l'air à travers les deux incisions du cuir chevelu, la communication entre les sinus frontaux et le tissu cellulaire subjacent à l'aponévrose épicrânienne étant interceptée; mais je constatai l'énorme développement de la moitié de l'os frontal, dont la table externe, considérablement amincie, dentelée, usée, semblait présenter dans l'intervalle de ces dentelures une grande perte de substance. Ce malade s'étant rendu coupable de plusieurs petits vols auprès de ses camarades, j'ai été obligé de le renvoyer. liard (1), cité par M. Bégin (2), ayant fait l'opération de la laryngotomie à un adulte, pour cause de croup, vit la glotte se rétrécir, de telle sorte qu'il fut obligé d'entretenir la plaie qu'il avait faite à la trachée. Ainsi un accoucheur très distingué de Paris, M. Évrat, affecté de laryngite chronique, ayant éprouvé plusieurs crises de suffocation, fut soumis à l'opération de la trachéotomie, dont l'ouverture fut entretenue à l'aide d'une canule qu'il porta tout le reste de sa vie, car le larynx paraissait oblitéré. Les vétérinaires entretiennent ainsi très souvent des fistules trachéales chez le cheval affecté de cornage, et l'oblitération du larynx en est souvent la conséquence. Il existe un petit nombre d'exemples de fistules laryngiennes muqueuses cutanées dont le principe est dans une carie ou nécrose des cartilages du larynx. Le plus souvent c'est vers la muqueuse que se dirige le pus, ce qui constitue une fistule purulente borgne interne. Il faut bien distinguer les fistules laryngiennes muqueuses cutanées des fistules laryngiennes incomplètes ou borgnes externes, qui reconnaissent pour cause un abcès froid, un ganglion lymphatique, une tumeur enkystée, lesquelles (1) Comme preuve de la tendance du larynx à se rétrécir ou à s'oblitérer, lorsque sa cavité n'est plus entretenue par le passage de l'air, je citerai le fait suivant : Un enfant affecté du croup fut trachéotomisé et mourut au bout de vingt-sept heures. A l'ouverture, nous vimes que les fausses membranes étaient limitées par l'orifice supérieur du larynx; la partie sus-glottique du larynx était littéralement oblitérée, et par la fausse membrane qui la tapissait, et par la disposition suivante : l'épiglotte était plissée en deux sur elle-même, et les deux moitiés se touchaient par leur surface interne; en outre, les replis muqueux épiglotti-aryténoïdiens et les cartilages aryténoïdes étaient tellement rapprochés de l'axe du larynx, qu'ils arrivaient au contact. J'ai eu occasion d'observer ce phénomène d'une manière encore plus tranchée, lorsque la canule avait séjourné pendant plusieurs jours. (2) Mémoire sur l'œsophagotomie (Journal universel hebdomadaire de médecine, Paris, 1833, t. XI.) |