l'État belge est que toutes les classes de ce tarif, au nombre de quatre, sont différentielles, c'est-à-dire que les bases d'application par kilomètre diminuent à mesure que la distance à parcourir augmente. Ce caractère du tarif actuel n'existait pas dans les tarifs généraux antérieurs à 1865. Les premiers systèmes de tarifs contenaient tous des taxes proportionnelles aux distances. En décembre 1860 seulement, on a publié le premier tarif différentiel, sous la forme d'un tarif spécial pour houilles et cokes, fontes brutes, chaux en vrac, moellons, pavés, etc. Puis peu à peu, le tarif différentiel gagne du terrain; il est introduit dans les classes inférieures du tarif général intérieur, et finalement le 1er septembre 1865, les taxes de la première classe, qui étaient restées seules jusque-là proportionnelles à la distance, deviennent à leur tour différentielles. A partir de cette date, les taxes proportionnelles à la distance ont disparu pour toujours du tarif général intérieur de petite vitesse de l'État belge. Tarif de 1837. La première solution donnée par l'État belge à la difficile et importante question de la tarification a été fort simple. Jusqu'au 15 avril 1839, l'État se borne à louer ses wagons, et à laisser aux expéditeurs et aux destinataires le soin d'effectuer la manutention de la marchandise. Il réduisait ainsi à un minimum le rôle du chemin de fer dans le travail du transport des marchandises; il offrait au public ses wagons et la force motrice de ses locomotives, sans se préoccuper ni du chargement ni du déchargement des marchandises. Entre Bruxelles et Anvers, distants de 55 kilomètres, la taxe perçue était de 30 francs par wagon, avec une charge de 2 500 kilogrammes, soit de o1,54 par wagon et kilomètre, et de of, 134 par tonne kilométrique (o1,67 par tonne-lieue)(*). Pour une période de onze mois d'exploitation en 1838, sur un réseau de 200 kilomètres de longueur moyenne exploitée, la recette des marchandises a atteint 58 594 francs. La recette des voyageurs s'était élevée, en 1838, à 2 935 818 fr., et celle des bagages à 103 421 francs. Ces résultats défavorables ne devaient point surprendre; ils étaient la conséquence même du système de tarifs au wagon adopté par l'État belge. Ce système excluait toute classification des articles, ne tenait pas compte de la valeur des marchandises; il supprimait les expéditions partielles, les colis de détail, et n'admettait que des chargements de wagons. Mais si on se reporte à l'époque où ce tarif était en vigueur, à la première année d'exploitation des chemins de fer, l'industrie et le commerce n'avaient pas encore atteint leur développement actuel ; il est clair qu'un petit nombre d'expéditeurs - comprenant quelques industriels, peu nombreux alors, et quelques négociants ou armateurs d'Anvers pouvait profiter du tarif au wagon et livrer des marchandises en poids suffisant pour former un chargement de wagon. Les expéditeurs dont les marchandises avaient un faible poids étaient dans l'impossibilité d'expédier leurs produits aux taxes du tarif au wagon. Par la force des choses, une industrie nouvelle dut surgir, celle des groupeurs et des commissionnaires de transport, auxquels les petits expéditeurs venaient amener leurs produits. Les groupeurs centralisaient et accumulaient les colis isolés dans leurs magasins, et une fois qu'ils avaient assez de marchandises pour effectuer le chargement d'un wagon, ils amenaient leurs colis au chemin de fer. Il y avait là un intermédiaire forcé entre le petit expéditeur, le petit producteur et l'administration du chemin de fer de l'État, et il a dû résulter (*) La lieue belge est de 5 kilomètres. Toutes les fois qu'il sera question de lieues dans ce travail, il faudra ne pas oublier qu'il s'agit de lieues de 5 kilomètres. en 1838, de l'application de ce système de tarifs, les mêmes inconvénients et les mêmes avantages qui devaient trente-trois années plus tard découler de la mise en vigueur du système de tarifs d'Alsace-Lorraine. Ce dernier système, qu'on a cru être une innovation introduite, en 1871, sur les chemins d'empire en Alsace-Lorraine, n'était donc que la reproduction du système appliqué par l'État belge en 1837. Nous ne ferons qu'indiquer sommairement les inconvénients et les avantages d'un pareil système : création d'une industrie nouvelle, celle des groupeurs ou camionneurs, intermédiaires entre le public et l'administration du chemin de fer; la grande industrie est favorisée plus que la petite industrie et le petit commerce; inégalité qui en résulte également entre les grandes villes, les grands centres industriels et commerciaux, et les petites villes, les stations privées de tout commerce et de toute industrie de quelque importance, parce que des groupeurs s'établiront dans les premières et ne voudront pas s'occuper du faible trafic des petites villes; séjour prolongé des colis dans les magasins du groupeur jusqu'à ce qu'il ait atteint le poids réglementaire d'un chargement de wagon. Le système de tarifs de 1837 avait, pour l'État belge, l'avantage de l'exonérer de toutes les questions de manutention des marchandises, de donner lieu à une bonne utilisation du parc de wagons. L'organisation d'une industrie telle que celle des groupeurs a dû exiger un certain temps pour être constituée et entrer dans son plein fonctionnement, et c'est peut-être dans ce motif qu'il faut chercher surtout la cause des faibles recettes obtenues, en 1838, avec le tarif au wagon. Nous avons dit plus haut que le petit producteur et le petit commerçant, dont les marchandises étaient en poids trop faible pour atteindre un chargement de wagon, se trouvaient réduits à remettre leurs produits à un groupeur ou à un commissionnaire qui réunissait tous les articles que lui livrait le petit commerce, et ne les expédiait par chemin de fer qu'en charge de wagon. Cependant la petite industrie avait, pour les objets de faible poids qu'elle voulait envoyer à un client, le tarif des petits paquets, tarif dont la taxe était beaucoup plus élevée que les taxes du transport des grosses marchandises. Les tarifs de marchandises des chemins de fer de l'État belge contiennent presque tous une distinction des marchandises en deux catégories, suivant que les expéditions ont un poids faible ou un poids important; les unes sont les petites marchandises ou petits paquets; les autres sont appelées les grosses marchandises. La limite séparative entre les petites et les grosses marchandises correspond, dans la majeure partie des tarifs appliqués pendant les premières années, à un poids de 500 kilogrammes. C'est l'importance du poids d'une expédition qui seule décide si elle est à taxer au tarif des petits paquets ou au tarif des grosses marchandises. Toute expédition de poids inférieur à 500 kilogrammes était comprise dans la catégorie des petites marchandises, et était soumise à une taxe plus élevée que les grosses marchandises, qui devaient être livrées en poids supérieur à 500 kilogrammes. Le même produit, suivant qu'il était expédié en poids inférieur ou supérieur à 500 kilogrammes, était taxé respectivement au tarif des petits paquets ou à celui des grosses marchandises. La taxe par tonne kilométrique pour les petites marchandises s'élevait, en 1838, à o1,40 (01, 20 par quintal-lieue). Le minimum de la perception était de o1,40. On a vu déjà qu'en appliquant le tarif au wagon de 1837 à une expédition en charge complète de wagon, le prix de transport de la tonne kilométrique de grosses marchandises s'élevait à o1,134. Le tarif des petits paquets était donc presque trois fois plus élevé que celui des grosses marchandises transportées en chargement de wagon. Le petit commerçant qui, avec ses marchandises de peu de poids, ne pouvait pas utiliser un wagon entier, et qui ne voulait pas payer la taxe élevée du tarif des petites marchandises, était donc obligé de recourir à un commissionnaire. Ce dernier, en réunissant toutes les marchandises de détail qui lui étaient ainsi amenées, les groupait en un chargement de wagon, et profitait de la taxe de transport au wagon. Il y avait, entre le tarif des petites marchandises et le tarif au wagon, une différence assez grande pour assurer au commissionnaire de beaux bénéfices; le petit commerce et la petite industrie eux-mêmes profitaient aussi d'une partie de cette différence. Dans le cours de cette étude sur les systèmes de tarifs adoptés par l'État belge sur son réseau de chemins de fer, nous ne reviendrons plus sur les tarifs appliqués au transport des petits paquets ou petites marchandises. Nous exclurons aussi de cette étude tout ce qui est relatif aux tarifs des finances, des équipages, chevaux, bestiaux, pour nous consacrer exclusivement à l'analyse des tarifs des grosses marchandises, qui constituent le véritable tarif général intérieur de petite vitesse des chemins de fer de l'État belge. Tarif de 1839. Le tarif de 1839 accuse un progrès; il inaugure l'expédition des grosses marchandises par tonne, tout en maintenant la location des wagons pour les transports entre les stations. Les marchandises transportées à la tonne sont manutentionnées par l'expéditeur et le destinataire; le chemin de fer n'encourt pas de responsabilité du fait de ces opérations. La taxe perçue est pour ces marchandises de o',134, par tonne et par kilomètre. Ce système de 1839 devait amener un rapide développement du trafic; il devait donner un nouvel essor à l'industrie du groupage en diminuant le minimum du poids |