me fixant d'un air aussi noble que dédaigneux : « Les chemins épineux, me dit-il, mènent à la gloire. >>> Ce jeune prince avait pour instituteur l'abbé Davaux, qui, plus d'une fois, eut occasion de remarquer l'esprit et la sensibilité de son élève. Un jour, monsieur le Dauphin, se rappelant une de ses leçons d'histoire, alluma furtivement une lanterne, et feignit de chercher quelque chose qu'il avait perdu. Tout à coup, il se retourna vers l'abbé Davaux, et dit en lui prenant la main : « Je suis plus heureux que Diogène, j'ai trouvé un homme. >>> L'abbé Davaux, lors du départ du roi pour Varennes, avait été quelque temps sans pouvoir donner de leçons à Mgr le Dauphin. Comme il les reprenait un jour, en présence de la reine, le jeune prince prince désira de commencer par la grammaire. << Volontiers, dit son instituteur. Votre dernière leçon avait eu pour objet, s'il m'en souvient, les trois degrés de comparaison, le positif, le comparatif et le superlatif. Mais vous aurez tout oublié. » << Vous vous trompez, répliqua le Dauphin; pour preuve, écoutez-moi. Le positif, c'est quand je dis: mon abbé est un bon abbé; le comparatif, c'est quand je dis: mon abbé est meilleur qu'un autre abbé; le superlatif, continua-t-il en fixant la reine, c'est lorsque je dis: Maman est la plus tendre et la plus aimable des mamans. » La reine prit le Dauphin dans ses bras, le pressa contre son cœur, et ne put retenir ses larmes. On se rappelle peut-être que Mgr le Dauphin allait se promener à un petit jardin qui faisait partie de l'enceinte des Tuileries, ct qui depuis a été comblé et élevé au niveau de la terrasse de l'eau. Un jour qu'il se disposait à partir pour cette promenade, et qu'au même moment il s'exerçait au maniement d'un fusil, l'officier de la garde nationale de service lui dit : « Monseigneur, puisque vous allez sortir, rendez-moi votre fusil. » Le jeune prince le refusa brusquement. La marquise de Tourzel, sa gouvernante, l'ayant repris de cette vivacité : << Si Monsieur m'eût dit de lui donner; fort bien, madame; mais lui rendre. (Hue, Dernières années de Louis XVI.) Esprit et bêtise. L'abbé Trublet prétendait être fin et ingénieux dans ses tournures et jusque dans la manière de placer ses virgules et ses points; il y a dans ses ponctuations une dépense d'esprit effrayante : c'était une bête de beaucoup d'esprit. Cela me rappelle le mot de Mme Geoffrin. On disait un jour devant elle que l'abbé Trublet était pourtant un homme d'esprit; elle se mit en colère, et dit que ce n'était qu'une bête frottée d'esprit; qu'à la vérité on lui avait mis de cette écume partout. Elle prétend que les hommes sont un composé de plusieurs petits pots; qu'il y a le petit pot d'esprit, le petit pot d'imagination, le petit pot de raison, la grande marmite de pure bêtise. Le destin prend de chacun de ces pots ce qui lui plaît, et en compose un ensemble qui forme la tête d'un homme. Suivant les Mémoires de Mme Geoffrin, le destin, voulant faire un abbé Trublet, ne puisa que dans la grande marmite; ensuite, craignant d'en avoir trop pris, il ouvrit le petit pot d'esprit, qui bout toujours et qui jette par conséquent de l'écume. Le destin, croyant puiser dans ce pot, n'en attrapa que l'écume, et en barbouilla le fond de pure bêtise de l'abbé Trublet. (Grimm, Correspondance.) Esprit et bon sens. eux Le président de Montesquieu et milord Chesterfield se rencontrerent faisant tous les deux le voyage d'Italie. Ces hommes étaient faits pour se lier promptement, aussi la liaison entre fut-elle bientôt faite. Ils allaient toujours disputant sur les prérogatives des deux nations. Le lord accordait au président que les Français avaient plus d'esprit que les Anglais, mais qu'en re vanche ils n'avaient pas le sens commun. Le président convenait du fait; mais il n'y avait pas de comparaison à faire entre l'esprit et le bon sens. Il y avait déjà plusieurs jours que la dispute durait; ils étaient à Venise. Le président se répandait beaucoup, allait partout, voyait tout, interrogeait, causait et le soir tenait registre des observations qu'il avait faites. Il y avait une heure ou deux qu'il était rentré et qu'il était à 1 ESP son occupation ordinaire, lorsqu'un in- | que cet homme qui vient si généreuse ment s'exposer au plus grand péril, pour vêtu ? - Oui, fort mal. connu se fit annoncer. C'était un Français assez mal vétu, qui lui dit : « Monsieur, je suis votre compatriote. Il y a vingt ans que je vis ici; mais j'ai toujours gardé de l'amitié pour les Français, et je me suis cru quelquefois trop heureux de trouver l'occasion de les servir, comme je l'ai aujourd'hui avec vous. On peut tout faire dans ce pays, excepté se mêler des affaires de l'État. Un mot inconsidéré sur le gouvernement coûte la tête, et vous en avez déjà tenu plus de mille. Les inquisiteurs d'État ont les yeux sur votre conduite; on vous épie, on suit tous vos pas, on tient note de tous vos projets; on ne doute point que vous n'écriviez. Je sais de science certaine qu'on doit, peut-être aujourd'hui, peut-être demain, faire chez vous une visite. Voyez, monsieur, si en effet vous avez écrit, et songez qu'une ligne innocente, mais mal interprétée, vous coûterait la vie. Voilà tout ce que j'ai à vous dire. J'ai l'honneur de vous saluer. Si vous me rencontrez dans les rues, je vous demande, pour toute récompense d'un service que je crois de quelque importance, de ne me pas reconnaître, et si par hasard il était trop tard pour vous sauver et qu'on vous prit, de ne pas me dénoncer. » Cela dit, mon homme dis-jectures possibles, et le président persis parut, et laissa le président de Montesquieu dans la plus grande consternation. Son premier mouvement fut d'aller bien vite à son secrétaire, de prendre les papiers et de les jeter dans le feu. A peine cela fut-il fait, que milord Chesterfield rentra. Il n'eut pas de peine à reconnaître le trouble terrible de son ami; il s'informa de ce qui pouvait lui ètre arrivé. Le président lui rend compte de la visite qu'il avait eue, des papiers brûlés et de l'ordre qu'il avait mis à tenir prête sa chaise de poste pour trois heures du matin; car son dessein était de s'éloigner sans délai d'un séjour où un moment de plus ou de moins pouvait lui être si funeste. Milord Chesterfield l'écoute tranquillement et lui dit : Cela est encore plus extraordinaire. Mais d'où sait-il tout ce qu'il vous a dit? Ma foi, je n'en sais rien... Des inquisiOutre que ce teurs, d'eux-mêmes. conseil est le plus secret qu'il y ait au monde, cet homme n'est pas fait pour en approcher. Mais c'est peut-être des espions qu'ils emploient. - A d'autres! On prendra pour espion un étranger, et un espion sera vêtu comme un gueux, en faisant une profession assez vile pour éètre bien payée; et cet espion trahira ses maîtres pour vous, au hasard d'être étranglé, si l'on vous prend, et que vous le défériez; si vous vous sauvez, et que l'on soupçonne qu'il vous ait averti! Chanson que tout cela, mon Mais qu'est-ce donc que ce ami. peut être? Je cherche, mais inutilement. » Après avoir épuisé toutes les contait à déloger au plus vite, et cela pour le plus sûr, milord Chesterfield, après s'ètre un peu promené, s'être frotté le front comme un homme à qui il vient quelque pensée profonde, s'arrêta tout court, et dit: « Président, attendez, mon ami, il me vient une idée. Mais, si par hasard... cet homme... bien! cet homme? - Si cet homme,... oui, cela pourrait être, cela est même, je n'en doute plus. que cet homme? Si vous le savez, dépéchez-vous vite de me l'apprendre. Si je le sais! oh! oui, je crois le savoir à présent... Si cet homme vous avait Épargnez, s'il été envoyé par...? vous plaît ! - Par un homme qui est malin quelquefois, par un certain milord Chesterfield, qui aurait voulu vous prouver par expérience qu'une once de sens commun vaut mieux que cent livres d'esprit; car avec du sens commun... Ah! scélérat, s'écria le président, quel tour vous m'avez joué! Ét mon manus Eh Mais qu'est-ce Voilà qui est bien, mon cher président; mais remettons-nous pour un instant, et examinons ensemble votre aventure à tête reposée. Vous vous moquez, lui dit le président. Il est impossible que ma tête se repose, où elle ne tient qu'à un fil. Mais qu'est-ce | crit! mon manuscrit que j'ai brûlé! >>> G t or C'est que, répliqua le religieux, cela ne vous empêche pas de croire aux omelettes. >>> (P. Larousse, Grand Dictionn. du XIXe siècle.) Le président ne put jamais pardonner | Pathée, mais que concluez-vous de là? au lord cette plaisanterie. ie. Il avait donné qu'on tint sa chaise prête, il monta dedans et partit la nuit même, sans dire adieu à son compagnon de voyage. Moi je me serais jeté à son cou, je l'aurais embrassé cent fois et je lui aurais dit : « Ah! mon ami, vous m'avez prouvé qu'il y avait en Angleterre des gens d'esprit, et je trouverai peutètre l'occasion, une autre fois, de vous prouver qu'il y a en France des gens de bon sens. » (Diderot, Lettre à Mile Vo- Esprit et science. Pitard, homme érudit, disait au poëte Théophile : « C'est dommage qu'ayant tant d'esprit, vous sachiez si peu de choses. C'est dommage, répondit Théophile, que sachant tant de choses, vous ayez si peu d'esprit (1) ». (Tallemant de Réaux.) Esprit fort. Le Père Lacordaire, étant en voyage, se trouva un jour assis, à table d'hôte, auprès d'un commis-voyageur qui faisait l'esprit fort. Après avoir discuté longuement contre l'existence de Dieu, il s'adressa au célèbre dominicain : « Monsieur, lui dit-il, c'est à vous de nous éclairer sur cette grave question... N'estil pas absurde de croire ce que notre raison ne saurait comprendre? - Nullement, répond le P. Lacordaire, je suis d'un avis tout différent... Comprenezvous comment il arrive que le feu fait fondre le beurre, tandis qu'il durcit les œufs, deux effets tout contraires traires sortant d'une même cause? Non, répond (1) Boursault, dans ses Lettres nouvelles, rapporte la même anecdote, dont il donne une version un peu différente: Un jour, dit-il, le poète Théophile disputant avec un religieux d'une profonde érudition, qu'il mettait fort souvent en état de ne lui pouvoir répondre, ce docteur, chagrin d'étre battu par un homme moins savant que lui, eut l'imprudence de lui dire: « En vérité, monsieur Théophile, c'est dommage que vous ayez tant d'esprit et si peu d'etude! - En vérité! mon révérend père, lui répondit Théophile, c'est dommage aussi que vous ayez tant d'étude et si peu d'esprit. » Esprit frappé. Au mois d'avril 1774, Louis XV, allant à la chasse, rencontra un convoi et s'approcha du cercueil. Comme il aimait à questionner, il demanda qui on enterrait. On lui dit que c'était une jeune fille morte de la petite vérole. Saisi d'une soudaine terreur, il rentra dans son palais, et fut, deux jours après, atteint de cette cruelle maladie dont le nom seul l'avait effrayé. Il était frappé à mort: son sang se décomposa; la gangrène se déclara; il mourut. (De Ségur, Mémoires.) Esprit frappeur. Dans une maison de spirites se trouvait une fervente croyante, à qui l'on demanda de faire quelques épreuves. Cette dame, sans se faire prier, tira son livre de sa poche et fit, à haute voix, une évocation à Safan... En entendant prononcer cet appel au prince des ténèbres, des personnes présentes avoua qu'elle n'avait pas le courage d'entrer en relation avec le diable. On la railla de sa peur et l'on attendit en silence. une Tout à coup on entend une voix, qui semble venir on ne sait d'où, puis des gémissements. Une dame se trouve mal; on l'emporte dans un salon voisin... Mais les gémissements continuent toujours... Le maître de la maison, auquel la prètresse soutient que c'est l'esprit invoqué, se pose carrément au milieu du salon et s'écrie : « Au nom de Dieu, qui es-tu? » Pas de réponse. Eh bien, alors, au diable? >>> Le silence continue. nom du L'assemblée ne respirait plus; mais un incrédule, il y en a partout, s'approche du mur d'où lui paraissaient venir les gémissements et le frappe en disant: « Qui es-tu ? » Une voix enfantine répond aussitôt : « Auguste. Que fais-tu? Je ramone. Et pour qui ramones-tu? Un fou rire éclata de toutes parts, et ceux qui avaient eu la plus grande peur furent les premiers à rire de l'aventure. Essais. Un gentilhomme dans Paris, qui était logé vers le Louvre, se trouva, à la rue Saint-Antoine, fort empêché de sa contenance; car il se trouva pressé d'aller lui-même où il ne pouvait envoyer personne, et dans un quartier si éloigné, où il n'avait aucune connaissance, il ne savait à quoi se résoudre. Il passe par hasard devant la boutique d'un tapissier, auquel il demanda s'il n'avait point une chaise percée; il lui en montra une : « N'en avez-vous point de plus riche? lui dit-il. Oui, Monsieur, répondit le tapissier, j'en ai de velours de toutes couleurs. - Allez, dit-il, m'en quérir deux ou trois, que je choisisse. Comme le tapissier eut le dos tourné, il làche l'aiguillette, et met son présent dans cette chaise qu'il lui avait premièrement apportée. Ce tapissier le voyant en cette posture, lui dit : « Que faites vous, Monsieur? Je l'essaye », répondit-il; et remontant ses chausses s'en alla, lui disant : « Je n'en veux point, elles sont trop basses. » (D'Ouville, Contes.) Estime et amour. Mume de Murville a tout l'esprit de sa mère (Sophie Arnould), et est extrêmement blonde. Ces deux personnes, en s'aimant beaucoup, se font réciproquement des niches assez gaies. Mlle Arnould avait aimé le comédien Florence, et après quelques mois l'avait congédié avec éclat. Mme de Murville applaudit à cette rupture, qu'elle croyait sincère. Ces jours derniers, elle va voir sa mère le matin, et la trouve tête à tête avec Florence. Quand celui-ci se fut retiré, elle témoigna son étonnement à sa mère. << C'est pour affaire que cet homme est venu ici, dit Mlle Arnould, car je ne l'aime plus. Ah! j'entends, répliqua Mme de Murville, vous l'estimez à présent. >>> Allusion fine au conte qui finit par ce vers. Combien de fois vous a-til estimée? (Métra, Correspondance secrète 1785.) Estime et estimation. unes L'Anglais Jancin, en badinant, mettait un prix aux femmes de la cour, et calculant à l'anglaise il estimait les mille louis, celle-ci cinq cents; il ne donnait de celle-là que cent louis; de cette autre que cinquante, etc. Sur quoi Mme de Boufflers, aujourd'hui Mme de Luxembourg, lui dit : « Parlez franchement, Jancin, et moi, là, combien m'estimez-vous? - Ah! vous madame, répondit-il d'un air respectueux en apparence, je ne vous estime point' (1). >>> (Collé, Mémoires.) Estime mutuelle. : Le chancelier Shaftesbury entendit un jour le roi Charles II d'Angleterre l'appeler le plus grand coquin qu'il y eût en Angleterre; il répondit hardiment « Votre Majesté a peut-être raison, si elle parle seulement de ses sujets. >>> Charles se mit à rire et les choses en restèrent là. (G. Brunet, Charliana.) (1) Ce mot rappelle celui de Piron, en réponse à cette question d'une dame. Pourquoi me considérez vous ainsi? Madame je vous regarde, mais je ne vous considère point. » Étiquette. Philippe III était gravement assis près d'une cheminée, dans laquelle les boute-feux de la cour avaient allumé une si grande quantité de bois, que le monarque était dans le cas d'étouffer de chaleur. Sa Majesté ne se permettait pas de se lever pour appeler quelque secours; les officiers de quartier s'étaient éloignés, et aucun domestique n'osait entrer dans l'appartement. Enfin, parut le marquis de Polar, auquel le roi ordonna d'éteindre ou de diminuer le feu. Mais celui-ci s'en excusa, sous prétexte que l'étiquette lui interdisait cette fonction, pour laquelle il fallait appeler le duc d'Ussede. Ce duc était sorti, la flamme augmenta d'autant; et le roi, pour ne pas déroger à sa dignité, en soutint constamment la chaleur. Mais il s'échauffa tellement le sang, que dès le lendemain il eut un érésipèle à la tête, avec une fièvre ardente, qui ne tardèrent pas à l'emporter. (De la Place, Pièces intéressantes.) Gaston de France était si jaloux des droits attachés à sa qualité, que sur cet article, il ne faisait grâce à personne. Pour avoir le plaisir de voir les princes du sang chapeau bas en sa présence, quand il trouvait une occasion de leur parler, il les tenait le plus longtemps qu'il pouvait, et jamais ne se découvrait un seul moment, tant il avait peur d'oublier ce qu'il était. Louis XIII allant un jour de Paris à Saint-Germain par une chaleur excessive, et Monsieur accompagnant Sa Majesté, les seigneurs qui étaient nu-tête aux portières du carrosse avaient toutes les peines du monde de résister à la violence du soleil. Le roi, qui s'aperçut de ce qu'ils souffraient, eut la bonté de leur dire : « Couvrez-vous Messieurs; couvrez-vous, mon frère le veut bien. (Boursault, Lettres nouvelles.) A une chasse où le roi d'Espagne (Philippe V) et la reine sa première femme étaient à cheval, ils se mirent à galoper; la reine tomba, le pied pris dans son étrier qui l'entraînait. Don Alonzo del Arco eut l'adresse et la légèreté de se jeter à bas de son cheval et de courir assez vite pour dégager le pied de la reine. Aussitôt après, il remonta à cheval et s'enfuit à toutes jambes jusqu'au premier couvent qu'il put trouver. C'est qu'en Espagne toucher au pied de la reine est un crime digne de mort. (Saint-Simon, Mémoires.) Un roi de Mandoa, dans l'Indoustan, étant tombé dans une rivière, en fut heureusement retiré par un esclave, qui s'était jeté à la nage et l'avait saisi par les cheveux. Son premier soin, en revenant à lui-même, fut de demander le nom de celui qui l'avait retiré de l'eau. On lui apprit aussitôt l'obligation qu'il avait à l'esclave, dont on ne doutait pas que la récompense ne fût porportionnée à cet important service. Mais il lui demanda comment il avait eu l'audace de mettre la main sur la tête de son prince, et surle-champ il lui fit donner la mort. Quelque temps après ce même prince étant assis dans l'ivresse, sur le bord d'un bateau, près d'une de ses femmes, se laissa tomber encore une fois dans l'eau. Cette femme pouvait aisément le sauver; mais croyant ce service trop dangereux, elle le laissa périr, en donnant pour excuse qu'elle se souvenait de l'histoire du malheureux esclave. (Histoire des Voyages.) M. de Novion, premier président du parlement de Paris, sous Louis XIV, était allé rendre visite au cardinal Ma zarin, premier ministre. Les deux battants des portes furent aussitôt ouverts à ce magistrat, comme cela se pratique; M. de Novion pénétra jusqu'à la dernière antichambre, où il resta, parce qu'il ne trouva point le cardinal de Mazarin venant au-devant de lui; un valet de chambre avait déjà annoncé le premier président à Son Eminence, qui travaillait en ce moment et qui se contenta de dire: <<< faites entrer. >>> Le domestique l'annonça une seconde fois, et comme le ministre répétait : « faites entrer, le valet de chambre lui dit que M. de Novion s'était arrêté dans l'antichambre. Le cardinal sentit alors ce que cela signifiait; il se leva au plus vite, et frappant de |