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LA

PIERRE DE TOUCHE

COMÉDIE EN CINQ ACTES ET EN PROSE

(AVEC JULES SANDEAU)

Représentée à la Comédie-Française, le 23 décembre 1853,

PERSONNAGES

FRANTZ WAGNER.

SPIEGEL.

LE BARON DE BERGHAUSEN.
LA MARGRAVE DE ROSENFELD.
FRÉDÉRIQUE WAGNER, cousine
de Frantz.

DOROTHÉE, fille de la margrave.
STURM, intendant du château.
GOTTLIEB, notaire.

UN LAQUAIS DU BARON.

UN LAQUAIS DE LA MARGRAVE. UN FACTEUR.

UN DOMESTIQUE DU CHATEAU.

La scène se passe en Bavière, vers 1825.

LA

PIERRE DE TOUCHE

ACTE PREMIER

Un atelier de peintre au rez-de-chaussée, éclairé du fond par un grand vitrage. A gauche du spectateur un chevalet avec un tableau, une petite table à côté; plus haut, une porte latérale; au fond, un piano; au milieu, la porte d'entrée; à droite, un divan adossé au mur; un petit meuble entre le divan et la porte d'entrée. Sur les murs, des plâtres, des ébauches; sur un bahut, un casque, une mandoline, des rapières; des vases de fleurs sur le piano

SCÈNE PREMIERE

SPIEGEL, peignant au chevalet; FRANTZ, étendu sur le divan, un journal à la main.

FRANTZ.

Dis donc, Spiegel, sais-tu qu'il y a eu un comte Sigismond d'Hidelsheim?

SPIEGEL.

Où ça?

FRANTZ.

Ici, à Munich.

SPIEGEL.

A quelle époque?

FRANTZ.

Pas plus tard qu'avant-hier.

SPIEGEL,

Et il est déjà terminé ?

FRANTZ.

Il durait depuis assez longtemps. (Lisant.) « 14 juil«<let 1825. Avant-hier matin est mort, à l'âge de soixante-cinq ans, le comte Sigismond d'Hildes<< heim, un des mélomanes les plus excentriques d'Al<< lemagne. >>

SPIEGEL.

Un mélomane!... Ah! c'est une perte que tu fais là, mon pauvre Frantz !

FRANTZ.

Oui, mais c'est une fière aubaine pour les héritiers. (Lisant.) « Il laisse une fortune d'un revenu de quatre << cent mille florins, et n'a que des parents éloignés. » Il y a des gens heureux.

SPIEGEL.

Il y en a beaucoup il y a d'abord nous deux.

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FRANTZ.

Tu es heureux, toi?

SPIEGEL.

Si je le suis!... Je me regarde tout simplement comme le plus fortuné des mortels. J'ai l'honneur d'être un honnête homme; je ne m'occupe jamais de politique ni de Bourse; je ne vais pas dans le monde ; enfin, je suis l'ami intime d'un grand artiste nommé Frantz Wagner. Que diable peut-on souhaiter de plus ?

De l'argent.

FRANTZ.

SPIEGEL.

De l'argent! Est-ce que nous en manquons? Il y a encore dix-huit florins dans le tiroir, sans compter trois kreutzers dans la poche de mon gilet. Tu aspires done aux trésors de Golconde? Tu envies le sort des nababs?

FRANTZ.

Ah! Spiegel, il te sied de faire bonne mine à notre pauvreté; mais moi, qui vis de ton travail, moi qui suis réduit à accepter de toi un dévouement...

SPIEGEL.

Je suis un homme antique, un parangon de l'amitié, c'est convenu; mais n'en parlons plus, que diable! et surtout n'y pensons plus.

FRANTZ.

N'y plus penser, quand je te vois tous les jours consommer ton sacrifice héroïque!... Crois-tu que je sois dupe de la feinte insouciance, et que je n'aie pas entendu plus d'un soupir, quand tes yeux se détour

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