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étions réunis tous trois dans cette chambre un soir d'été; Frantz venait de terminer une symphonie, et je la jouais sur le piano; aux dernières notes, la porte s'ouvre, et nous voyons entrer un étranger...

SPIEGEL.

Vieux, grand, sec, nez en bec d'aigle, canne à pomme d'ivoire, bague de cornaline au doigt

C'était bien lui!

DOROTHÉE.

FRÉDÉRIQUE.

Je pass is devant votre fenêtre, nous dit-il, votre musique m'a arrêté; je me suis assis sur le banc de pierre, et j'ai tout écouté. Apprenez-moi quel est l'auteur de cette symphonie, digne de Beethoven. >>

SPIEGEL.

«Elle est de mon ami Frantz Wagner. » lui dis-je fièrement. Alors il pria Frédérique de la recommencer, et, quand elle eut fini, il s'approcha de Frantz, et, lui imposant la main sur le front : « Monsieur Frantz, lui ditil, vous êtes un maître. » Il s'y connaissait.

FRÉDÉRIQUE.

Alors il s'assit entre nous et nous questionna sur notre existence avec une si paternelle bonté, que nous lui avons tout raconté, et que le récit a duré jusqu'à onze heures du soir. « Je reviendrai, dit-il en nous quittant, j'ai passé près de vous les plus douces heures de ma vie... Monsieur Spiegel, faites-moi la grâce de composer un tableau de cette scène. »

SPIEGEL.

Il tira de son portefeuille un billet de cinq cents florins qu'il me remit pour à-compte, et il partit sans que nous songions à lui demander son nom. Nous ne l'avons pas revu.

C'est tout?

DOROTHÉE.

LA MARGRAVE.

Il est tombé malade vers la fin du printemps; malgré nos soins, il ne s'est plus relevé.

SPIEGEL

Pauvre brave homme!

DOROTHÉE.

Il avait de singulières idées d'entrer ainsi chez les gens... C'est égal, le tableau est très-ressemblant. Ah! monsieur, quel délicieux passe-temps que la peinture! SPIEGEL, d'un air gracieux.

Ah! mademoiselle... Et le battage en grange, donc !

LA MARGRAVE.

Votre récit m'a tellement intéressée, que j'ai oublié mes courses. Je vous remercie, madame, des douces heures qu'a passées près de vous le comte Sigismond. Vous voudrez bien accepter de moi une bagatelle... qui ne m'acquittera pas envers votre mari.

FRÉDÉRIQUE.

Je vous rends grâces, madame, en mon nom, au nom de mon cousin.

LA MARGRAVE.

Votre cousin?... Ah!... venez, ma fille. François, prenez ce rouleau. Messieurs, ne vous dérangez pas. (Elle sort avec sa fille, le laquais les suit.)

SCÈNE X

SPIEGEL, FRANTZ, FRÉDÉRIQUE.

FRANTZ.

A la bonne heure! voilà une vraie grande dame!

FRÉDÉRIQUE.

Elle est très-gracieuse.

SPIEGEL.

As-tu remarqué, Frantz, qu'elle s'est refroidie tout à coup en apprenant que Frédérique n'est pas ta

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LE LAQUAIS DE LA MARGRAVE, rentrant.

Madame la margrave envoie ceci à M. Frantz avec ses compliments. (Il remet un petit rouleau, salue et sort.)

FRANTZ, prenant le rouleau et le donnant à

Frédérique.

Déjà son souvenir à Frédérique !

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FRÉDÉRIQUE, défaisant le rouleau.

C'est vrai, de l'or!

Tu vois!

SPIEGEL.

FRANTZ.

C'est une impertinence pire que celle du baron! SPIEGEL, prenant le rouleau des mains de Frédérique et le mettant dans sa poche.

La margrave a raison. Elle avait promis un souvenir à ta femme, et non à ta... cousine.

FRANTZ.

Ah! je comprends! Elle a cru... Mordieu! je cours après elle pour lui dire...

SPIEGEL.

Rien qu'elle puisse croire. Le monde, qui n'est pas dans le secret de notre existence, a le droit de juger sur les apparences.

FRÉDÉRIQUE.

Que voulez-vous dire, Spiegel?

SPIEGEL.

Cela ne vous regarde pas. (A Frantz.) Frédérique

n'est plus une enfant, tu me le disais toi-même; que veux-tu qu'on pense de son séjour ici? Tu vois qu'à notre premier contact avec le monde la fausseté de la position se fait sentir.

C'est vrai.

FRANTZ.

SPIEGEL.

Il faut couper court aux interprétations, et le moyen est simple Frédérique t'aime d'amour.

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FRÉDÉRIQUE.

Moi! Qui vous l'a dit?

SPIEGEL.

Je l'ai parbleu bien vu tout à l'heure!

FRÉDÉRIQUE.

Mais, Spiegel, en vérité, je ne sais pourquoi...

SPIEGEL.

Que de façons, mon Dieu! c'est vous qu'il aime.

Est-ce vrai, Frantz?

FRÉDÉRIQUE.

FRANTZ, Souriant.

Puisqu'il te le dit!

FRÉDÉRIQUE.

Oh! que je suis heureuse! Vilain Spiegel, qui m'avait fait croire... (Elle lui saute au cou.)

SPIEGEL, à part.

Voilà mon rôle de père qui commence.

Et moi, Frédérique ?

FRANTZ.

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