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Aubry. J'ai déclaré hier Louis coupable de conspiration contre la liberté, et d'attentats contre la sureté générale de l'Etat. Je vote pour la mort, et je renvoie l'exécution après les assemblées primaires qui auront lieu pour la ratification de la Constitution. Mon opinion est indivisible.

Balla. Je vote pour la réclusion pendant la guerre, et le bannissement à la paix.

Rabaut-Pomier. Lorsque la Conventiou décréta qu'elle jugerait elle-même Louis, je vis dans ce décret rendu par article additionnel et sans discussion préalable, une source de maux pour la république. Je crus alors que la Convention pourrait en éviter une partie, en appelant le peuple à la ratification du jugement qu'elle aurait prononcé, et j'ai opiné pour cette mesure. Vous l'avez rejettée, et les suites funestes que peut avoir le supplice de Louis ordonné par vous seuls, m'en paraissent plus inévitables. Ce supplice ralliera les tyrans, éloignera de nous et de notre révolution des peuples que nous voulions rendre libres, et dont les forces nous seront funestes, an lieu de nous être utiles; il divisera la France; il donnera aux émigrés et aux ennemis intérieurs un chef plus actif, plus habile, plus entreprenant que Louis détrôné, méprisé, haï et captif, ne peut l'être : il laissera le trône plus libre à ceux qui veulent y arriver, et qui auront plus de ressources pour y monter, que celui à qui nous les avons toutes ôtées; il laissera à leurs soutiens et aux agitateurs subalternes, plus de facilités pour désorganiser la république; et au milieu des ennemis, de la pénurie, des divisions et des maux qui l'assiégent, augmenter tant d'obstacles par cette mesure impolitique, c'est contribuer à la perdre. Cependant nous avons été députés sur-tout pour la sauver; et c'est par un motif de sureté générale que nous nous occupons du sort de Louis. Je gémis aussi sur les massacres auxquels tant de patriotes ont été exposés; mais la vengeance la plus utile à la république que l'on puisse tirer du sang versé, est d'en prévenir une nouvelle effusion; et les victimes que le tyran a immolées à son ambition nous désavoueraient, si nous ne prenions pas la mesure qui nous paraîtra la plus propre à épargner le sang de leurs frères et de leurs concitoyens.

Je déclare done que je crois que Louis mérite la mort; mais que l'intérêt politique ne la demande pas. Si cependant vous la prononcez, et quel que soit votre jugement, je crois que l'exécution doit en être renvovée après que les décrets constitutionnels, que vous avez déjà faits, auront été présentés à la ratification des assemblées primaires, et mon opinion est indivisible.

Chasal, fils. Mes commettans m'ont envoyé pour prononcer sur le sort ds Louis. Je n'ai jamais douté de cette mission. Je suis convaincu que Louis est coupable: mais sa mort, quoique juste, me paraît avoir des dangers que n'a pas sa conservation. Ces dangers, qui grondent dans l'avenir, et qui sont déjà prêts à s'élancer sur ma patrie, me font un devoir de soumettre à mes commettans une décision éventuellement funeste, ou à en prendre une qui ne soit pas irrévocable. Je vote pour la mort, mais en adhérant à la réserve proposée par Mailhe, relative au sursis.

Le président. Citoyens, je vais proclamer le résultat du scrutin. Vous allez exercer un grand acte de justice : j'espère que l'humanité vous engagera à garder le plus profond silence. Quand la justice a parlé, l'humanité doit avoir son tour.

L'Assemblée est composée de 749 membres. 15 membres se sont trouvés absens par commission, 7 par maladie, I sans cause, 5 non votans, en tout 28; le nombre restant est de 721. La majorité absolue est de 361.

Deux ont voté pour les fers; 286 pour la détention et le bannissement à la paix, ou pour le bannissement immédiat, ou pour la

réclusion, et quelques-uns y ont ajouté la peine de mort conditionnelle, si le territoire était envahi; 46 pour la mort avec sursis soit après l'expulsion des Bourbons., soit à la paix, soit à la ratification de la Constitution.

361 ont voté pour la mort; 26 pour la mort en demandant une discussion sur le point de savoir s'il conviendrait à l'intérêt public qu'elle fût ou non différée et en

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déclarant leur vœu indépendant de cette

demande.

Ainsi, pour la mort sans condition..... 387. Pour la détention, etc. ou la mort conditionnelle...... 334.

Je déclare, au nom de la Convention nationale, que la peine qu'elle prononce contre Louis Capet, est celle de mort.

(Il règne, pendant toute cette proclamation, le plus profond silence.)

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Les trois défenseurs de Louis sont admis à la barre.

Desèze porte la parole. Citoyens représentans de la Nation, la loi et vos décrets nous ont confié la défense de Louis; nous venons avec douleur aujourd hui en exercer le dernier acte. Louis nous a donné une mission expresse; il a chargé notre fidélité du devoir de vous transmettre un écrit de sa main et signé de lui: permettez que j'aie l'honneur de vous en faire lecture.

« Je dois à mon honneur, je dois à ma famille de ne point souscrire à un jugement qui m'inculpe d'un crime que je ne puis me reprocher; en conséquence, je déclare que j'interjette appel à la Nation elle-même du jugement de ses représentans; je donne par ces présentes, pouvoir spécial à mes défenseurs officieux et charge expressément leur fidélité de faire connaître à la Convention nationale cet appel, par tous

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les moyens qui seront en leur pouvoir, et de demander qu'il en soit fait mention dans le procès-verbal de la séance de la Convention »,

Signé, LOUIS CAPET.

Citoyens, nous vous supplions d'examiner dans votre justice, s'il n'existe pas une grande différence entre le renvoi spontané de votre part, du jugement de Louis à la ratification du peuple français, et l'exercice du droit naturel et sacré qui appartient à tout accusé, qui appartient à tous les individus; oui, à tous, et par conséquent à Louis; si nous n'avons pas élevé nous-mêmes ces questions dans la défense de Louis, c'est qu'il ne nous appartenait pas de prévoir que la Convention nationale se déterminerait à le juger; ou qu'en le jugeant, elle le con

damnerait.

Nous vous la proposons aujourd'hui pour remplir envers Louis ce dernier devoir; vous-mêmes, nous en avez chargés, et nous vous conjurons de la balancer avec cette sainte impartialité que la loi demande.......... Citoyens, tolle était la mission fatale dont Louis nous avait chargés. Maintenant que nous venous d'apprendre que le décret fatal qui a condamné Louis à la mort, n'a obtenu la majorité sur les suffrages de la Convention, que de cinq voix (1), et encore pourrions

(1) Le scrutin a été recensé de nouveau parce qu'il y avait erreur dans le premier recensement, et il a donné le résultat qu'on vient de lire.

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