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tain qu'il fortiroit de la circulation une fomme de fes billets égale à celle qui se trouve dans fon porte-feuille; mais le numéraire resteroit toujours dans les retraites où la frayeur, l'inquiétude & le defir de nuire l'ont relégué.

Je n'essayerai pas, Messieurs, de vous peindre les malheurs qui accableroient le commerce de la ville dont vous êtes les Représentans, si dans le moment le plus critique par la cessation des ventes, par celle des paiemens, par l'abfence d'une foule de débiteurs qui font ou retirés chez l'Etranger, ou cachés dans leurs terres, la refsource de l'intervention de la Caisse d'Efcompte pour acquitter ses engagemens lui étoit interdite. Je profite de cette occafion pour rendre un témoignage public à cette classe d'hommes à laquelle j'ai l'honneur d'appartenir, à ces commerçans si utiles, à ces marchands si actifs, à ces ouvriers si laborieux qui vont enfin jouir d'une confidération méritée qu'un préjugé barbare leur refusoit depuis fi long-temps. Oui, Meffieurs, c'est sur eux que pèse davantage une révolution qui, en faifant le bonheur de l'Empire, diminue la profpérité de la Capitale. Eh bien, ils ne profitent pas de ces circonstances pour se soustraire à leurs engagemens; ils les acquittent avec fidélité, & foigneux de conserver cet antique

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honneur François qui commençoit à s'éteindre, ceux qui ne peuvent les remplir en totalité s'adressent avec confiance à leurs Créanciers, bien sûrs d'en obtenir tous les délais qui leur font nécessaires.

Béniffons donc cette révolution, qui en resserrant tous les liens qui attachent entr'elles les classes de la société, n'a fait de tous les habitans de cette ville qu'un peuple de frères.

Je ne combattrai pas, Messieurs, le moyen qu'on vous a offert pour remplacer les billets de la Caisse d'Escompte : il me semble que ce seroit abuser de vos momens que de vous dé montrer les inconvéniens multipliés d'un papier nouveau, qui ne pourroit offrir aux porteurs des sûretés plus grandes que celles qui accompagnent aujourd'hui l'ancien.

Il me semble enfin qu'un effet qui est garanti par la Nation, qui est cautionné par 170 millions d'affignats, au remboursement duquel est obligée une Compagnie qui a un actif réel de millions, ne peut être remplacé avec avantage pour le public par un qui n'offrira pas des gages plus folides.

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Le plan que vous ont proposés vos Commifsaires dans leur rapport du 31 Janvier, a ren

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contré encore un adversaire redoutable dans la personne de M. Brissot de Warville. Je refpecte ses talens, mais je ne puis partager ses opinions: je suis encore obligé de répéter ici que je ne suis pas le défenseur de la Caisse d'Escompte, que je ne confidère cet établissement que sous les rapports que les circonstances & l'Assemblée Nationale ont établis entre la Nation & lui. Je me trouve forcé de vous rappeler l'époque où M. Necker fut reporté au ministère des Finances; vous n'avez sans doute pas oublié, Meffieurs, que son prédécesseur, M. l'Archevêque de Sens, après avoir épuisé tous les moyens qui étoient en sa puissance, fut forcé de suspendre le paiement des rentes, celui de tous les effets publics à époque fixe, & que la réclamation universelle que cette fufpenfion occasionna, le précipita de la place qu'il occupoit.

M. le Directeur-Général, à son arrivée, ne trouva ni argent dans les coffres, ni papier avec 'lequel il pût s'en procurer. Je dois vous dire, à cet égard, que les fonds provenans de l'emprunt ouvert en faveur des grêlés avoient été employés à un autre usage; que ce qui devoit être la ressource de nos Campagnes défolées, que ce qui devoit adoucir & réparer en partie la ruine des cultivateurs n'avoit pas même été respecté. M. Necker regarda autour de lui, & se trouva seul avec son courage : il s'adressa alors à la Caisse d'Escompte, à laquelle il ne cacha pas la situation des affaires, & elle lui fournit les premiers secours avec lesquels il prépara la convocation des Etats-Généraux.

Je puis donc dire, avec un écrivain auffi connu par sa probité, par fon patriotisme, que par ses talens littéraires, que si la Caisse d'Escompte se fût refusée aux instances du Ministre, que si à la vue du gouffre entr'ouvert devant elle, elle eût reculé, la chose publique eût péri, & que nous ferions encore esclaves (1).

Je supplie les vrais amis de la Patrie, qui sont ceux de la liberté, de ne pas perdre de vue cette idée, & peut-être alors ils sauront quelque gré à une société qui, quoiqu'en disent les personnes qui voudroient élever leurs projets fur ses ruines, s'est exposée pour le salut de l'Etat. Je suis perfuadé que l'Assemblée Nationale, après l'examen, & la discussion des différens plans relatifs aux Finances qui lui ont été présentés, après avoir entendu le rapport que lui ont fait ses Commissaires, de la situation de la Caisse d'Escompte, rapport dans lequel

(1) M. Dupont.

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font détaillées d'une manière très-précise toutes
les avances qu'elle a faites au Gouvernement,
rapport qui constate que fon actif supaffe de
102 millions fon passif, a préféré cet établisse-
ment qui étoit tout fait, à celui à faire d'une
Banque Nationale dont les opérations ne pou-
voient être plus avantageuses pour l'Etat, &
que, puisqu'il falloit remplacer l'absence de l'ar-
gent par un numéraire fictif, celui de la Caisse
d'Efcompte méritoit à tous égards la préfé-

rence.

Je ne vous dissimulerai pas que j'ai été fort étonné d'entendre dire à M. Briffot de Warville que la perception des subsides étoit toujours la même, sauf le vuide des Aides, de la Gabelle, & de la Ferme du Tabac : ce langage, dans la bouche d'un homme aussi éclairé, est une preuve bien triste de cette vérité que les meilleurs esprits peuvent aussi devenir les apôtres de l'erreur.

Comment a-t-il pu regarder comme une bagatelle des objets qui rapportent annuellement 160 millions, & dont la non-perception ajoute encore à la masse déja trop considérable du déficit ? Nous savons tous que les Provinces n'acquittent pas leurs contributions, & que, malgré les réductions prodigieuses qui ont été faites dans tous les Départemens des Ministres, dont les dépenses relatives à la maison de Sa

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