11) L'impératrice-reine jouit de toute la souveraineté dans les villes d'Ostende et de Nieuport; le roi a simplement prêté de ses troupes à son alliée pour la garde de ces places. L'Angleterre n'a aucun droit d'imposer au roi et à l'impératrice une loi contraire aux volontés de S. M. et de S. M. Impériale, qui ne blessent en aucune façon les traités de la maison d'Autriche avec les Etats- Généraux. Au reste, le roi veut bien déclarer, que jamais son intention n'a été de garder les dites places en sa possession après le retour de la paix. 12) L'article 12 de l'ultimatum de l'Angleterre ne parait pas susceptible de difficultés, lorsque les termes de la suspension convenue seront observés et maintenus de bonne foi. 13) En réponse à la déclaration faite par M. Stanley, qu'en cas d'une paix particulière entre la France et l'Angleterre, S. M. Britannique continuerait d'aider constamment en qualité d'auxiliaire, son allié le roi de Prusse de tout son pouvoir et de toute sa bonne foi, afin d'obtenir la fin salutaire de la guerre et la pacification de l'Allemagne; le duc de Choiseul, au nom du roi son maître a déclaré audit M. Stanley, que S. M. par la même vue de la pacification générale, soutiendrait aussi de toutes forces et de tout son pouvoir ses fidèles alliés, et prendrait toutes les précautions que sa bonne foi et sa fidélité reconnues lui suggéreraient, afin d'éviter que la paix particulière de la France avec l'Angleterre puisse leur nuire. C'est en conséquence de ces sentiments, que le roi, du consentement de ses alliés, veut bien stipuler qu'il ne fournira aucun secours dans aucun genre à ses alliés pour la continuation de leur guerre contre le roi de Prusse, mais S. M. ne peut ni ne veut prendre cet engagement, qu'autant que S. M. Britannique en prendra un pareil relativement au roi de Prusse. La proposition de laisser la liberté à la France d'envoyer des armées en Silésie, est défavorable par les positions, aux intérêts de l'impératrice, et par conséquent inadmissible. Le roi persiste donc dans les propositions contenues dans l'article 10 de son premier mémoire. Tout ce qui pourrait être négocié sur ces points, serait la liberté de fournir des secours en argent aux alliés réciproques, lorsqu'il sera bien constaté qu'il ne sera libre à aucune puissance de leur fournir des secours en troupes ni munitions de guerre, sous quelque dénomination que ce puisse être. 14) Le roi accepte l'article 14 de l'ultimatum d'Angleterre. La cour britannique conviendra, à ce qu'on espère, de la clarté des réponses à son ultimatum, ainsi que de la facilité avec laquelle le roi cherche, même à son préjudice, les moyens de parvenir à sa conciliation avec le roi de la Grande-Bretagne. Telles étaient les dernières propositions pour obtenir une paix déjà assez chèrement achetée par la cession des plus belles colonies, et par la démolition des fortifications de Dunkerque ('). Par les instructions qui furent envoyées à M. de Bussy avec l'ultimatum, il lui fut enjoint, d'accorder la cession du Canada dans toute l'étendue que désirait l'Angleterre, pourvu que la pêche sur les côtes et dans le golfe Saint-Laurent fut conservée à la France, et que l'Angleterre désignât un port dans cette partie, qui fût soumis à la souveraineté du roi, et qui servit d'abri aux pêcheurs français. (1) Le silence que le cabinet de Versailles avait gardé longtemps sur Dunkerque, était volontaire. Il avait semblé au conseil du roi, que les cessions que l'on faisait à l'Angleterre, méritaient bien que cette puissance lui épargnât l'affront de la démolition de ce port. Si cependant on était réduit à cette extrémité, l'amour que le roi portait à ses sujets, lui arracherait son consentement sur cet objet; mais „disait M. de Choiseul, c'est un dernier moyen de terminer, qu'il „faut réserver pour la fin de la négociation." Flassan, Hist. de la · dipl. fr. Il était prescrit à M. de Bussy de convenir des limites du Canada et de la Louisiane, d'après la carte anglaise, quoique très-défavorable aux droits et aux possessions de la France. Quant à la partie de l'Afrique, le ministre du roi était autorisé à consentir aux cessions demandées par l'Angleterre, pourvu que l'exportation des nègres fût assurée aux Français d'une manière aussi solide que facile; et S. M. faisait le sacrifice de Dunkerque, en compensation de la sûreté de la pêche dans le golfe Saint-Laurent, en faveur de ses sujets. Pour ce qui regardait l'Asie, M. de Bussy était autorisé à accorder que les compagnies française et anglaise des Indes, traitassent entre elles de leurs intérêts particuliers, à condition qu'elles suspendraient les hostilités pendant les négociations, et que les avantages de l'une ou de l'autre compagnie entreraient en compensation par rapport aux intérêts respectifs des deux couronnes. Quant à la convention avec l'Espagne, on envoya à M. de Bussy une copie des articles qu'elle renfermait, et par lesquels on stipulait formellement que le roi ne ferait la paix, qu'après que la cour de Madrid aurait obtenu des Anglais une satisfaction convenable. Tous les différents cas étaient prévus; si l'ultimatum de la France était rejeté, M. de Bussy ne devait point parler de la convention, parce qu'il était inutile de fournir aux Anglais un prétexte de plus pour colorer leur rupture; si les propositions de la France étaient mises en négociation, M. de Bussy devait s'attacher à démêler quelle en serait l'issue: s'il n'en espérait aucun succès il devait garder le même silence sur la convention; s'il soupçonnait une décision favorable, il ne devait point se hâter de la produire; mais se borner à rappeler les griefs de l'Espagne, et appuyer sur la nécessité dont il était pour l'Angleterre, que les différends de la France et de l'Espagne fussent conciliés à la fois, afin de rendre la paix inalterable. Le duc de Choiseul disait encore dans les instructions:,,Si les Anglais contre toute attente accep,,taient notre ultimatum, vous diriez à M. Pitt, que ,,ce n'est plus comme ennemi de l'Angleterre, mais ,,comme son ami que le roi voulait confier à S. M. ,,Britannique ses engagements avec l'Espagne; vous ,,lui confieriez l'article de la convention; vous lui de„manderiez conseil sur cet article; vous lui feriez sen,,tir notre embarras; embarras que nous ne pouvons ,,éviter, vu l'incertitude de la paix; et que nous ne ,,pouvons pas éluder à présent par deux motifs; celui „de la fidélité due à la parole donnée, et celui du ,,désir de la solidité de la paix. Vous ajouterez que ,,nous ne pouvons pas croire, que pour des différends ,,faciles à ajuster et par une espèce de pointille de ,,vanité, le roi d'Angleterre veuille continuer le mal,,heur de l'Europe, laisser toutes les puissances en ,,crainte et en méfiance, et ne pas profiter des avan,,tages que la paix doit donner à l'Angleterre." Il était du reste expressément recommandé à M. de Bussy, de dérober la connaissance de cette dépêche au marquis de Fuentès, ambassadeur d'Espagne à Londres. D'après ces mêmes instructions envoyées à M. de Bussy, ce ministre devait insister sur l'article de la restitution des bâtiments français pris avant la guerre par la marine anglaise. M. de Bussy eut même ordre de remettre sur cet objet particulier le mémoire suivant. No. XXV. Mémoire relativement aux vaisseaux pris avant la guerre. La réclamation des prises de vaisseaux faites par les Anglais sur les Français, avant la déclaration de guerre, a son fondement dans les traités d'Utrecht et d'Aix-laChapelle. On ne conteste pas le principe que le droit d'exercer les hostilités ne résulte pas toujours de la formalité d'une déclaration de guerre; mais comme il n'est pas praticable que deux princes qui se font la guerre, statuent entre eux lequel est l'agresseur de l'autre, l'humanité et l'équité ont inspiré des précautions pour que dans le cas où la rupture vient à éclater à l'imprévu et sans déclaration préliminaire, les vaisseaux étrangers qui, naviguant sous l'abri de la paix et des traités, se trouvent dans les ports respectifs dans le temps de la rupture, aient le temps de se retirer en toute liberté. Cette loi si sage, si conforme aux règles de la bonne foi, fait partie du droit des gens, et l'article du traité qui consacre ces précautions, doit être exécuté fidèlement, malgré la rupture des autres articles du traité, qui résulte naturellement de la guerre. Les cours de France et de la Grande-Bretagne ont pris cette précaution salutaire dans les traités d'Utrecht et d'Aix-la-Chapelle; dans les premiers, par l'article 19 du |