prince de Galles, le duc d'York et le duc de Cumberland, partager ses principes torys, tandis que Guillaume IV, le duc de Kent, le duc de Sussex et le duc de Cambrigde étaient plus ou moins dévoués aux whigs, ou indifférents à toute politique. L'avénement de la reine Victoria au trône amena la séparation de la couronne britannique de celle de Hanovre. Cette dernière était réunie à celle d'Angleterre depuis l'avénement au trône britannique de George Ier, électeur de Hanovre et chef de la famille de Brunswick; mais, en 1814, l'électorat de Hanovre ayant été érigé en royaume, il avait été décidé par le congrès de Vienne que cette principauté serait séparée de la Grande-Bretagne, lorsqu'une princesse ceindrait le diadème du royaume-uni. La couronne revenait à Ernest, duc de Cumberland, oncle de la reine. Il l'accepta, et son départ excita une joie universelle parmi les membres des partis whig et radical. Toutefois, le duc de Cumberland ne voulut point faire abandon de ses droits à la couronne d'Angleterre ; il prêta serment de fidélité à la reine, et conserva par là le droit de siéger à la chambre haute. Le 20 novembre 1837, la reine se rendit à la chambre des lords, afin de procéder à l'ouverture du nouveau parlement, et, selon la coutume, elle dut prononcer d'abord la déclaration de foi suivante, exigée des souverains à leur avénement au trône : « Moi, Alexandrina-Victoria, j'affirme et déclare sincèrement et solennellement, en présence de Dieu, que je crois qu'il n'y a dans le sacrement de la cène de Notre-Seigneur aucune transsubstantiation des éléments du pain et du vin dans le corps et le sang du Christ, et que cette transsubstantiation n'est opérée ni pendant ni après la consécration. Je crois que l'invocation ou l'adoration de la Vierge Marie et des saints, ainsi que le sacrifice de la messe, tels qu'ils sont pratiqués dans l'Église de Rome, sont superstitieux et idolâtres. » Le couronnement de la reine n'eut lieu que l'année suivante, 1838, à Westminster, antique abbaye qui date du commencement du xi° siècle, que tous les rois d'An gleterre se sont plu à embellir, et dont le peuple a fait le sanctuaire des gloires nationales 1. Cette cérémonie eut le plus grand éclat; tous les États 1. Les sept chapelles qui entourent l'église sont encombrées de tombeaux, de statues et de busies. On remarque les tombeaux de Marie Stuart, de Charles II, d'Elisabeth, de Jacques ler, de George II, d'Edouard le Confesseur, de Henri III, de Henri V, ceux de Monk, de Buckingham, du duc de Montpensier, frère du roi LouisPhilippe, de Watt, etc., etc. Dans l'aile méridionale, on trouve le coin des poëtes (the poets's corner), où reposent tous les grands écrivains de l'Angleterre, depuis Shakspere jusqu'au comédien Garrick, son interprète; dans l'aile du nord sont les hommes d'Etat Fox, Pitt, Canning, etc.; près d'eux est la statue de l'acteur Kemble. Dans un des bas côtés de la nef est le monument de Newton. Disons aussi que le privilége d'être enterre à Westminster a été trop prodigue, et que l'on trouve là trop de gens qui n'ont eu d'autre droit d'entrer en si illustre compagnie qu'en payant à la porte. de l'Europe s'y trouvèrent représentés. La reine, en se rendant à l'antique abbaye, avait été saluée par les acclamations les plus vives. D'autres cris tout à fait inattendus, des vivat en l'honneur de la France, vinrent tout à coup s'y mêler. Le maréchal Soult assistait à cette solennité en qualité d'ambassadeur extraordinaire; sa voiture fut entourée et suivie par une foule enthousiaste. Il eût été fort difficile, d'ailleurs, de pénétrer le véritable sentiment qui donna lieu à cette ovation éclatante: peut-être fut-ce un impartial hommage rendu, par une grande nation, aux talents d'un grand capitaine; peut-être encore n'y devait-on voir qu'une énergique et puissante expression de la vanité nationale: l'Angleterre se croyait assez forte de sa propre gloire pour admirer hautement l'homme qu'elle avait combattu. A la fin de cette même année 1838, il fut décidé que la jeune reine unirait sa destinée à celle du prince Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, dont la famille était, il est vrai, peu puissante, mais qui se montrait digne, sous tous les autres rapports, d'une telle alliance. Le mariage fut célébré, le 10 février 1839, dans la chapelle royale de Saint-James, avec la plus grande pompe, et sans omission d'aucune des formalités religieuses, qui, en Angleterre, prêtent un caractère si frappant à ces solennités officielles. La population s'associa par des démonstrations enthousiastes au bonheur que cette union promettait à la famille royale'. Mais peu s'en fallut que cette joie publique ne se convertit promptement en deuil: cinq mois après le mariage de la reine, le 11 juin 1839, deux coups de pistolet étaient dirigés contre elle, dans Hyde-Park, par un jeune homme nommé Édouard Oxford. Un mouvement du prince Albert, un hasard heureux, sauvèrent les jours de la reine. La politique était, du reste, demeurée étrangère à cette criminelle tentative, et il sembla résulter des incidents du procès, que l'assassin avait agi sous les inspirations de la folie. 1. De ce mariage sont nés Victoria-Adelaide-Mary-Louisa, le 21 novembre 1840 Albert Edward, prince de Galles, 9 novembre 1841; Alice-Maud-Mary, le 25 avril 1843; Alfred-Ernest-Albert, le 6 août 1844; Helena-Augusta-Victoria, le 25 mai 1846. Insurrection du Canada (1837). Victoria avait conservé au pouvoir le cabinet whig qui en était investi à la mort de son prédécesseur, et qui avait pour chef un libéral des plus modérés, le vicomte Melbourne, et pour membres principaux : lord Palmerston, tory converti; lord John Russel, adversaire infatigable du bigotisme protestant et de tous les vieux préjugés; enfin l'Écossais Macaulay, auteur d'une très-remarquable histoire d'Angleterre et l'un des esprits les plus distingués et des plus nobles cœurs dont puisse s'honorer la Grande-Bretagne. Ce ministère avait la minorité dans la chambre des lords; et, dans la chambre des communes, il ne se soutenait qu'avec l'assistance d'O'Connell d'une part, et des radicaux de l'autre. La position était donc déjà fort difficile lorsqu'elle fut compliquée par un événement inattendu. La France ayant, par le déplorable traité de 1763, cédé le Canada à la Grande-Bretagne, le gouvernement anglais avait, aussitôt après la prise de possession, proclamé l'abolition de la loi française, remettant l'autorité tout entière aux mains d'un gouverneur et d'un conseil, nommés tous deux par la couronne. Cet état de choses ne fut modifié que lors de la guerre de l'indépendance américaine; à cette époque le ministère, craignant que le Canada ne suivit le mouvement insurrectionnel de la Nouvelle-Angleterre, s'empressa de demander au parlement un bill destiné à régir les colonies anglaises d'Amérique. Cet acte législatif, en concédant aux colons des droits moins restreints, et en leur accordant une part dans l'administration des affaires locales, satisfit particulièrement les habitants du Canada, qui, trop mal instruits des choses de la politique pour bien apprécier la portée de cette mesure, pensèrent que les chambres anglaises avaient eu réellement en vue l'intérêt et la prospérité des colonies. La loi nouvelle divisa la contrée en deux provinces, qui prirent le nom de haut et de bas Canada. L'administration Louisa - Caroline-Alberta, le 18 mars 1848; Arthur-William-Patrick-Albert, le jer mai 1850. de chacune de ces provinces fut composée d'un gouverneur nommé par le roi; d'un conseil exécutif dont les membres étaient également choisis par la couronne; d'un conseil législatif, espèce de chambre haute; enfin, d'une assemblée législative, dont les attributions n'étaient pas sans analogie avec celles de la chambre des communes d'Angleterre, et qui était comme elle le résultat de l'élection. Le mandat des députés durait quatre ans; ils étaient élus par les habitants possédant un bien-fonds d'un revenu de cinquante francs, ou payant un loyer annuel de cent vingt-cinq francs. En agissant ainsi, le gouvernement anglais avait semblé vouloir entrer dans une voie essentiellement libérale; mais bientôt les colons s'aperçurent que cette concession avait des avantages plus apparents que réels. En effet, l'acte du parlement réservait aux gouverneurs un droit qui annihilait le pouvoir de l'assemblée législative, puisqu'ils avaient la faculté de refuser leur sanction aux bills votés par les chambres coloniales, ou tout au moins de réserver leur assentiment jusqu'à ce que le roi eût pris connaissance du vote et l'eût approuvé ou repoussé, les mettant ainsi à couvert sous l'irresponsabilité royale. Ce qui contribuait enfin à rendre tout à fait illusoire l'autorité du parlement canadien, c'était la possibilité pour la couronne, d'annuler pour deux années la sanction accordée par le gouverneur. Au lieu d'être confiées à des administrateurs honnêtes et justes, les places devenues vacantes furent abandonnées, les unes à des fils de famille dissipateurs, que des membres de l'aristocratie britannique voulaient éloigner pendant quelque temps de la métropole; les autres à des protégés de grands seigneurs, qui n'acceptèrent ces emplois qu'afin de s'enrichir et d'aller jouir, en Angleterre, d'immenses fortunes acquises sans efforts. Un autre fléau vint peser sur cette malheureuse colonie. La couronne s'était déclarée propriétaire de toutes les terres inoccupées, dont le nombre était considérable, et ayant distribué d'énormes quantités de terrains à des membres influents du parlement anglais, ceux-ci vendirent leurs droits à des spéculateurs, qui ne sachant pas ce qu'ils avaient acheté, puisqu'il était impos |