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M. le président. & On a élevé la question de savoir si les Cours d'assises pourraient être juges des questions de compétence, parce que la loi ne le disait pas. On a répondu que quand il y avait interposition de la chambre d'accusation, à qui la loi avait dévolu le droit de statuer sur la compétence, ce droit n'appartenait pas à la Cour d'assises; mais on a reconnu que quand on retirait la chambre d'accusation, qu'on traduisait directement devant la Cour d'assises, le droit appartenait toujours à un accusé de décliner la compétence du juge devant lequel il comparaissait pour la première fois, et qu'alors c'était à la Cour d'assises à statuer sur sa compétence. Une autre question a été élevée par M. Thil: après que la Cour d'assises a statué sur la compétence, pourra-t-on se pourvoir contre cet arrêt et faire juger le pourvoi distinctement, et par là retarder le jugement du fond; c'est alors que M. le garde des sceaux a dit que ce serait contre le projet de loi qui veut abréger la procédure, et il a proposé une rédaction. Ensuite M. Renouard en a proposé une antre qu'il a empruntée à une loi sur la presse. Sur cette rédaction, moi-même, pour que la Chambre votât en connaissance de cause, j'ai demandé si le mot compétence était compris dans le mot incident. On a répondu: oui, mais on a mieux aimé que le mot fût inséré dans la loi. C'est sur cette rédaction que je vais consulter la Chambre. M. Moreau de la Meurthe. « L'honorable M. Teste a fait une difficulté qui, ce me semble, n'en est pas une. Si la Cour se déclare incompétente et que le ministère public veuille se pourvoir en cassation, faudra-t-il que la Cour juge le fond, pour que cette voie soit ouverte au ministère public? Je réponds que, dans le cas où la Cour se sera déclarée incompétente, elle ne jugera pas le fond, par la raison toute simple qu'elle ne croit pas avoir le pouvoir de le faire; mais qu'alors le ministère public sera libre de se pourvoir de suite en cassation contre l'arrêt d'incompétence, sauf, après l'arrêt de cassation, à être procédé ainsi que de droit. »

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M. Laurence. « Si l'on veut faire dire à l'article ce qu'on entend par les commentaires qui viennent d'être faits, il ne faut pas dire que le pourvoi ne sera pas permis; car on statue sur la compétence aussi bien en la gardant qu'en la repoussant; en sorte que le procureur-général lui-même n'aura pas le droit de se pourvoir... » (Bruits divers.)

Cet article est mis aux voix et adopté. (Mon. du 14 août 1835, 2° supplément.)

Art. 8. Au jour indiqué pour la comparution à l'audience, si les prévenus ou quelques-uns d'entre eux refusent de comparaître, sommation d'obéir à justice leur sera faite au nom de la loi par un huissier commis à cet effet par le président de la Cour d'assises et assisté de la force publique. L'huissier dressera procès-verbal de la sommation et de la réponse des prévenus.

M. le garde-des-sceaux a dit dans l'exposé des motifs:

« Les art. 8 et suivans s'appliquent non-seulement aux juridictions chargées par nos lois de juger les attentats à la sûreté de l'état, mais à tous les tribunaux criminels ou correctionnels. Ces dispositions ont pour objet d'assurer le maintien et le respect d'an principe sans lequel aucune juridiction ne conserverait la dignité de son caractère et la liberté de son exercice. Ce principe est que force doit toujours demeurer à justice. Les juridictions établies tiennent leur autorité de la loi, non du consentement des accusés; ceux-ci n'ont point à accepter le débat, mais à le subir; et s'ils veulent se soustraire à la nécessité de rendre compte de leurs actions, il faut qu'ils puissent y être contraints par la force, car la justice doit rester maîtresse, sous peine de devenir esclave des accusés. »

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Le rapporteur de la chambre des députés s'est exprimé sur les mêmes dispositions dans les termes suivans:

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Les art. 8 , 9 et 10 du projet sont trop d'accord avec la justice, avec la raison, pour qu'il soit nécessaire d'ajouter quelque explication à leur texte. A'vrai dire ces dispositions existaient déjà virtuellement dans nos Codes car on ne comprendrait point que dans le pays le plus civilisé, chez une nation qui s'enorgueillit, à juste titre, de la perfection de ses lois, la puissance et la majesté de la justice eussent été laissées à la merci de la violence on de l'obstination des prévenus à qui, par système ou dans leur intérêt, il conviendrait de rendre tout jugement impossible. Mais de récens exemples ont assez prouvé qu'il est des temps où, tout pouvant être mis en doute, les principes les plus clairs ont besoin d'une sanction plus expresse, d'une énonciation minutieuse. »

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M. le duc de Bassano a proposé un amendement ainsi conçu :

«Si, au jour indiqué, les prévenus ou quelques-uns d'entre eux se refasent à la comparution prescrite par l'art. 310 du Code d'instr. crim., la Cour ordonnera qu'ils soient amenés par la force devant elle, ensemble ou séparément. A toutes les autres périodes de la cause, si les prévenus ou quelques-uns d'entre eux refusent de comparaître, sommation d'obéir, etc.» (Comme dans la loi.)

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M. le duc de Bassano. « La question se réduit à celle-ci : la présence de l'accusé est-elle nécessaire à l'ouverture du procès ? Nous répondrons qu'elle est indispensable, parce que la loi la commande, parce que tout le système de notre procédure criminelle l'exige, parce que la raison, la justice, lcs mœurs, ne permettent pas les condamnations anonymes, parce que c'est la présence réelle de l'accusé qu'il faut aux jurés, aux témoins, au public. Si les témoins n'ont pas vu, reconnu l'homme dont ils ont parlé, ils ont parlé en vain; ils n'ont porté que des lumières incertaines ou plutôt de fausses clartés dans la conscience du jury: le jury doit se taire. S'il est écrit dans la loi que la présence de l'accusé n'est indispensable à ancune des périodes du procès, il ne nous restera qu'un pas pour répudier le bienfait de la procédure orale. »

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M. Félix Faure a appuyé l'amendement. « Son but, a-t-il dit, est que dans tous les cas l'accusé soit amené devant ses juges. Là, de deux choses l'une ou l'accusé se conduira avec décence, et alors les débats continueront, quelque parti qu'il prenne, soit qu'il juge à propos de se taire, soit qu'il veuille se défendre. Que si, au contraire, l'accusé rendait par des violences quelconques le cours de la justice impossible, alors le juge, usant du droit de l'art. 10, prononcerait son exclusion de la salle d'audience, et les débats continueraient en son absence comme ils eussent continué en sa présence. Jusqu'à présent nous avions tenu pour constant que l'accusé sous la main de la justice devait comparaître devant les juges, Cela est écrit dans l'art. 310; il me semble que changer le principe est une chose grave, que l'altérer même est une faute. L'art. 8 ne propose pas seulement de l'altérer, mais il contient une sorte d'autorisation à l'accusé de se refuser à comparaître, et cette autorisation peut être consacrée par un arrêt, puisque le président ou la Cour peuvent décider que l'accusé sera amené par la force, ou passer outre aux débats, hors sa présence, c'est-à-dire qu'il sera possible qu'il n'ait comparu ni devant les témoins, ni devant les jurés, ni devant le public. Cette procédure serait à la fois pleine de dangers dans l'intérêt de l'accusé et dans l'intérêt de la justice. Dans l'intérêt de l'accusé; car comment est-il possible de constater exactement l'identité de l'accusé, et quelle source d'erreurs ne résulterait-il pas dans ce cas des débats? Comment serait-il possible, dans ces débats, d'interroger les témoins à décharge de contredire les témoins à charge? Dans l'intérêt de la justice; en effet, indépendamment de ce qu'il y a de fâcheux dans des débats d'une nature si singulière, que n'y a-t-il pas à craindre de l'abus que peuvent faire les accusés de cette mystérieuse procédure? »

M. le garde des sceaux : » Pourquoi veut-on substituer au droit facultatif donné à la Cour, l'obligation de faire comparaître l'accusé dans tous les cas? On nous dit que c'est pour constater l'identité de l'accusé, pour le faire reconnaître par les témoins : mais à quelle époque faudra-il que la Cour soit obligée de faire venir l'accusé? Suivant l'amendement de M. Cousin (voy. sur l'art. 9), c'est au moment où les témoins déposent. Il a été réconnu par M. le duc de Bassano lui-même, que cela était impossible, qu'on ne pou vait pas retenir l'accusé pendant toute l'audition des témoins et l'interroga toire de l'accusé. C'est le premier jour, au commencement de l'affaire qué la Cour sera obligée de faire venir l'accusé. Qu'est-ce que le commencement de l'affaire ? Est-ce le tirage des jurés ? Vous voulez-donc que la Cour le fasse venir à la chambre du conseil. Est-ce l'identité qui se constatera à ce moment? Qui est-ce qui le fera? Personne; les témoins n'y sont pas, ils ne doivent pas y assister. Vous le ferez revenir: second spectacle scandaleux; et, en effet, ce n'est pas sans inconvénient, sans un grand scandale pour le public, qu'un homme est ainsi amené de vive force, avec violence, déchiré

pas

dans ses es vêtemens, dans sa personne, ensanglanté. Il y a des dangers dans l'exercice de cette violence: les jurés, s, hommes du monde, peu habitués à ces impressions, ne peuvent pas supporter la vue d'un homme ensanglanté, dont les habits sont déchirés; ils sont saisis à cette vue ou de pitié ou de colère; ils n'ont plus le calme qui convient à des juges; le sang-froid de l'impartialité. Quand on propose de laisser à la Cour cette faculté suivant les ›circonstances, je ne peux pas exiger autre chose ; je ne veux aller plus loin que la Cour, qué les jurës. Les accusés ont été vus par tout le monde, en première instance; le juge d'instruction les a entendus; il a confronté les témoins et l'accusé. Comment est-il possible de dire que l'on juge sans avoir vu l'accusé ? J'ajouterai que le président d'assises a dû se rendre à la maison de justice pour interroger les prévenus, dresser procès-verbal de son interrogatoire. Il ne restera donc que les jurés qui ne l'auront pas vu: s'ils le croient nécessaire, ils le demanderont; et il n'est pas possible de supposer qu'un tribunal refuse de faire usage "du droit, que nous proposons de faire amener l'accusé de vive force, etc.

L'amendement a été rejeté. M. Cousin l'a reproduit sous l'article suivant. (Mon. du 28 août 1835.)

M. Faure a demandé si les art. 8 et 9 s'appliquent au cas où les accusés refusent de comparaître à la chambre du conseil.

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M. le garde des sceaux a répondu qu'il lui semblait inutile d'employer la contrainte pour amener l'accusé à la chambre du conseil, et que cette contrainte ne lui semblait pouvoir commencer qu'avec l'audience.

M. de Laplace a demandé si l'huissier dresserait procès-verbal dans le cas où l'accusé obtempérerait à la sommation.

M. le rapporteur a pensé qu'on ne devait dresser le procès-verbal, que pour constater le refus.

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'M. le garde des sceaux a dit que tel n'était pas le sens de l'article. Quand un homme ne fait pas de résistance, les gendarmes l'amènent, il n'y a pas de procès-verbal'; mais si l'huissier vient rapporter que l'accusé ne vient pas, avant d'exercer la violence qui peut le conduire à l'audience, on dresse procès-verbal de la position dans laquelle se trouve l'accusé. Mais ce n'est pas là le seul cas dans lequel le procès-verbal doive être dressé.

L'article a été adopté.

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Art. 9. Si les prévenus n'obtempèrent point à la sommation, le président pourra ordonner qu'ils soient amenés par la force devant la Cour; il pourra également, après lecture, faite à l'audience, du procès-verbal constatant leur résistance, donner que, nonobstant leur absence, il sera passé outre aux débats. Après chaque audience, il sera, par le greffier de la Cour d'assises, donné lecture aux prévenus qui n'auront point comparu, du procès-verbal des débats, et il leur sera signifiés

copie des réquisitoires du ministère public ainsi que des arrêts rendus par la Cour, qui seront tous réputés contradictoires.

M. le garde des sceaux a dit dans l'exposé des motifs:

« Si le président ne juge point nécessaire de recourir à l'emploi de la force pour faire amener à l'audience les prévenus qui refuseraient de comparaître,

il

pourra ordonner qu'il soit passé outre aux débats, nonobstant l'absence des prévenus, qui ne pourront imputer qu'à eux-mêmes les fruits de cette absence. Le projet de loi contient d'ailleurs tout ce qui peut en atténuer pour eux les conséquences. Chaque jour, après l'audience, lecture leur sera donnée par le greffier du procès-verbal de ce qui s'y sera passé. Si les prévenus s'obstinent à ne point comparaître, ils donnent suffisamment à croire qu'ils n'ont aucune justification à opposer aux charges produites contre eux; aussi d'après la législation d'un pays voisin, auquel nous avons emprunté le jugement par jurés, le prévenu qui refuse de répondre à la justice, est-il par cela même réputé convaincu du crime dont on l'accuse. Plus généreux, nous laissons au prévenu toutes les chances qui peuvent résulter de l'examen impartial des preuves à charge et à décharge, mais nous demandons que jugement qui suivra soit réputé contradictoire; car accorder à un accusé la faculté de rendre, par son absence volontaire, tout jugement définitif impossible, ce serait lui accorder l'impunité.

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M. Hennequin a demandé le retranchement de cette disposition:

le

« C'est pour présider à la défense, a dit cet orateur, c'est pour donner des renseignemens sur des faits d'une date quelquefois éloignée, c'est aussi dans certaines circonstances pour déjouer de redoutables intrigues que la loi veut que l'accusé soit présent aux débats. Là il importe qu'il jouisse de toute la puissance de sa raison, de tout le calme conciliable avec cette redoutable situation d'accusé ; et la loi, dans une pensée noble et généreuse, déclare que les accusés paraîtront libres et sans fers. Eh bien, je déclare qne la scène de violence autorisée par le projet, ne peut amener pendant les débats que les récriminations et les cris d'indignation de l'accusé. Or, l'art. 11 a prévu des clameurs qui pourraient troubler l'audience et qui pourront attirer des peines sur leurs auteurs.... La lutte que vous allez établir entre un homme et ́les nombreux agens dont la société dispose, est, d'abord, une chose déplorable et qu'il faut prévenir. Mais pendant le débat, la force est un non sens. Il a toujours été reconnu que la contumace et le refus d'obéir, peuvent se constater par des actes de pure forme. L'art. 8 ne constate-t-il pas le refas de l'accusé ? N'est-il pas certain qu'il n'a pas voula obtempérer? Eh bien, je vous propose de dire que si les prévenus n'obtempèrent pas à la sommation qui leur aura été faite, conformément à l'article précédent, le président des ́assises pourra ordonner, après la lecture du procès-verbal constatant leur résistance, qu'il soit passé outre aux débats. Il ne faut pas que les présidens des Cours d'assises se croient dans la nécessité d'ordonner des violences de

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